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vendredi 5 juillet 2024

Shoes Syndicate


  Dans une Amérique d’un autre temps et du Nord industriel, Donald E. Westlake m’embarque à Wittburg, petite bourgade, célèbre pour son usine à chaussures McIntyre qui emploie directement un tiers de la population sachant qu’un second tiers travaille pour le premier. Autant dire que McIntyre est le poumon – ou le cœur, voir les deux pieds - de cette petite cité ouvrière. D’ailleurs, Paul débarque au motel du coin. Stagiaire, il est là pour prendre des premiers contacts aux abords de l’usine afin de monter un syndicat national au sein de l’usine.

  « Penser ? j'en étais bien incapable. J'ouvris la bouche toute grande et ma mâchoire s'affaissa. Je me pétrifiai littéralement, comme dans l'attente du coup de tonnerre qui suit l'éclair. 
« Tué à coups de revolver... » Les mots tourbillonnaient dans ma tête. Tué à coups de revolver. Coups de revolver... Coups de revolver... Coups de à revolver... 
Je n'avais jamais vu d’homme tué à coups de revolver. Je n'avais pour imaginer la chose que des souvenirs de cinéma. Les mots me revenaient sans cesse à l'esprit, avec des images de film qui passaient en éclair, se croisaient, se confondaient. Willick attendait, lui aussi, tout en m'observant.
Les images et des lambeaux de phrases de verdicts se pressaient dans ma tête. « Tué à coups revolver », puis... « assassinat avec préméditation »,... « reconnu coupable des chefs d’inculpation… » « Pendu par le cou jusqu'à ce que mort s'ensuive ». 
Moi ? Moi ? »

  Mais dès son arrivée, il y a un truc qui cloche. Son premier contact est retrouvé mort, « tué à coups de revolver »… Aussitôt des soupçons se posent sur sa personne, il est arrêté par la Police locale, de force, pour ne pas dire tabassé afin qu’il révèle sa vérité.

  Un petit polar d’un autre temps et d’une belle originalité qui malmène autant Paul que l’ambiance délétère de cette petite bourgade. Les Syndicats n’en sortent pas forcément grandi, on peut vite lorgner vers un côté mafieux. Quant à la Police, on voit très bien comment elle fonctionne ici, et n’est guère mise à l’honneur… Bien au contraire…

  Heureusement, à deux pas du motel, le bar du coin, toujours ouvert pour recueillir les âmes blessées et injuriés. Je commande un Benriach, Smoky Ten, une odeur fumée comme les mégots et cendres qui jonchent à même le sol et se mêlent à la poussière du coin. Cela faisait très longtemps que je n’avais pas lu un Westlake, un roman noir de la vieille époque…  

  « Le bar était une grande bâtisse en briques jaunes précédée d'un parking goudronné. Une enseigne au néon pendait d'une potence fixée au-dessus de l'entrée : Tango Inn. Deux Plymouth, une Chevrolet, un microbus Volkswagen et une vieille Packard étaient parqués devant la porte. J'arrêtai la Ford à côté et entrai. »

« Un loup chasse l’autre », Donald E. Westlake
Traduction : Antoine Béguin.





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