lundi 29 avril 2019

Fleur de Geisha

Et si je levais un peu les yeux de mon bouquin...

« - Le printemps est là, a-t-elle murmuré en flairant le vent. Les cerisiers n'allaient pas tarder à fleurir. Le ciel avait un sourire rose tendre. »

Sentir le vent bousculer ma crinière ondoyante et voir s'emmêler quelques fleurs de cerisier venir atterrir dans mon verre de bière. Regarder ces fleurs si éphémères embellir les vies de promeneurs anonymes, de belles amoureuses ou de sombres et tristes solitaires. Comme un feu d'artifice floral qui illumine les jardins à l'ombre du zen et des temples. D'ailleurs, question temple, je me retrouve à Kamakura. Splendide ville où règne le Daibutsu de sa majestuosité, des vagues qui se déchirent sur ses falaises, et de longues marches d'escalier pour atteindre l'antre sereine des nombreux temples égrainés aux abords de la forêt.

« Les oiseaux bavardaient gaiement, comme s'ils picoraient les vestiges de la nuit. »

Guider par quelques senteurs, animer par le plaisir d'un thé fleur de geisha, je découvre une papeterie que je n'avais jusqu'à présent jamais osé pénétrer. C'est que je suis timide et qu'il me faut du temps pour oser m'aventurer dans certains plaisirs de la vie. M'attabler à la terrasse, commander une bière, et la regarder, écrire, s'appliquer sur chaque syllabe calligraphiée, trouver le bon sens d'écriture, l'enveloppe adéquate, la qualité du papier, de l'encre, de la plume, surtout pas de critériums. Même le choix du timbre a son importance. Chaque chose a de la valeur dans la correspondance, même dans une lettre de rupture. 

lundi 22 avril 2019

Whiskey et Tennessee


« Il glissa une main furtive dans son soutien-gorge, pour cueillir au creux de sa main son sein droit. Assurément, jamais chair n'avait été aussi douce, ni aucun fruit aussi délicat. Cathy bougea à son tour, son bras doit entoura la gorge de Thibodeaux, la pression de ses cuisses augmenta légèrement, mais de façon perceptible, elle plaqua son pubis contre lui. Est-ce qu'il devenait fou, s'imaginant des choses, ou bien sentait-il vraiment entre ses jambes une source de chaleur ? »

Sandy Thibodeaux et John Stoneburner dans les années soixante-dix, deux pauvres types qu'une guerre du Vietnam a déglingué un peu leurs ambitions et flingué leur avenir. Du genre, c'était par leurs guerres, pourtant ils y sont allés, y ont survécu, et se retrouvent maintenant au retour de carnages perdus dans cette Amérique-là. Thibodeaux traîne ses guêtres parmi les décharges du Tennessee, Stoneburner est dans le genre détective privé, sans secrétaire bien roulée. Ils se sont perdus de vue, l'un a sauvé l'autre au Vietnam, à moins que ça soit l'inverse. Ils vont se retrouver dans une affaire de magot, de fuite et de drogue, l'un ayant été engagé par Cap Holder pour retrouver l'autre.

« Il serra son sein un peu plus fort, il en pinça doucement le mamelon entre le pouce et l'index, il sentit même une pression minuscule entre ses doigts, les lèvres de Cathy glissant sur sa gorge, un grondement sourd lui emplissait les oreilles, l'éternité bâillait et il ne voulait pas lui résister. Il sentait son sang courir à la surface de sa peau, et sur son ventre, son érection était brûlante sur toute sa longueur. »

vendredi 19 avril 2019

L’art de la Fugue

« L’élixir sacré de cette cérémonie était le pastis. Il coulait à flots dans tous les verres mais son parfum anisé écœurait Nicole et elle était la seule à consommer du cap-corse, un mélange amer de vin, de plantes aromatiques, d’écorce d’orange et de quinquina. Elle sirotait sa liqueur avec une paille parfois assise sur le bar, en observant et appréciant l’étrange comédie humaine. A l’heure de la fermeture, des ombres titubaient dans les ruelles pour regagner le domicile conjugal, où les épouses, comme tous les soirs, s’étaient assoupies dans une attente toujours déçue. La nuit corse était exquise, fraîche et parfumée. Seules la lune ou les étoiles éclairaient les épaisses maisons de pierre, il n’y avait pas de réverbères, pas d’électricité […] Dans leur délicieux nuage d’ivresse, tout semblait mystérieux et beau. »

Sa musique me berce depuis de longues années. Comme le père. Un poète enchanteur, des mots qui m’émeuvent, ses textes sont des proses magnifiques à lire, juste avec quelques notes de piano ou quelques longs silences qui égrènent ma vie. « Fugues », son art, ses doutes, sa liberté. Un instantané autobiographique sur la jeunesse, une ode à la liberté. Arthur décide de s’ouvrir, son cœur, son âme, sa fugue sera l’objet de cette musique. Assis devant un piano, tentant de déchiffrer l’art de la fugue de Johann Sebastian Bach, il va se plonger dans ses souvenirs.  

Au cours de cette écriture, s’écrit une étrange coïncidence, une autre fugue, en plus de la sienne et celle de Bach. Quelques années plus tôt, sa mère Nicole trop enfermé dans le carcan parental et sociétal, quitte sa ville d’Argenteuil avec quelques amis. Direction la Polynésie et Tahiti. Le voyage débutera par la Corse, elle n’ira pas plus loin. Mais ce besoin d’être libre était plus fort que tout.

lundi 15 avril 2019

Chimay ou Saké


Aujourd’hui, je m’envole pour le Japon. Rendez-vous amoureux avec cette brune épicée biberonnée à la bière dès les prémices de l'enfance, de la gueuze à la Chimay au pays du saké. Sans stupeur, ni tremblement. J’ai toujours aimé boire des bières brunes avec une belle brune, surtout en tenue d’Adam et d’Eve. C’est comme ça qu’elle est la meilleure, la brune. D’ailleurs cela fait bien longtemps que je l’ai perdu de vue. Des mois que mon chemin solitaire s’est vu écarter de sa route, littéraire. Bref, je m’écarte de la voie de la bière, ou celle de l’amour, ou celle des cerisiers japonais. En 1989, Amélie atterrit au Japon, comme un retour  au pays de son enfance. Elle donne des cours de français – ou de belge, va savoir les mystères du langage et son décodage – et tombe amoureux de son élève, Rinri. Et comme Rinri rime avec Amélie, je laisse de côté la Kirin, bonne pour accompagner quelques sushis et autres yakitoris, pour me rincer l’œil d'une belle gueuze, une geisha au kimono entrouvert, sers-moi donc une Chimay que je mate ton sexe épilé.

« Nous bûmes de la bière Kirin. J’avais apporté de la Chimay qui se fût bizarrement accommodée avec la sauce d’Hiroshima. Les cervoises asiatiques sont d’idéales bières de table. »