Qu’ils s’appellent Roxane, Mélissa ou Kevin, qu'ils aient à peine douze ans, qu’ils vivent dans un quartier populaire, qu'ils habitent dans un « bloc » d’appartements, Hochelga-Maisonneuve…
Ils se croisent à peine mais grandissent plus vite face à l’adversité de la vie. Ils essayent surtout de survivre, tout en gardant une part de rêve dans un recoin de leur tête. L’espoir qu’un jour leur père ou leur mère reviendront à la réalité, celle qui consiste à former une famille, aussi petite soit-elle, à retrouver de l’amour et de la complicité même dans et sous les coups durs.
« Roxane ferme sa porte. Des cris. Des cris. Des mots. Des coups. Son nom. Sa mère qui crie son nom. Roxane ouvre son tiroir. Cherche ses écouteurs, trouve ses écouteurs.
Chostakovitch, les violons. Plus fort, plus fort encore. Les violons la fenêtre la neige snieg qui tombe comme des lignes du ciel à l’eau comme des lianes pour s’agripper, pour monter très haut, jusqu’en haut, les flocons tombent en lianes du sol au ciel, le violon de Chostakovitch coule sur elle, puis coule en elle. Roxane est une corde, stridente sous l’archet, Roxane vibre, Roxane explose, vole par-dessus la rue, par-dessus les corps morts, par-dessus la marde, jusqu’aux bateaux, jusqu’au fleuve, jusqu’en Russie. Roxane est une symphonie. »
Le tableau dans ce coin de Montréal ne fait pas dans le rose-bonbon. Entre un père « catcheur » loseur et vieillissant qui perd son job au garage, une mère alcoolique qui se fait tabasser par son chum et une autre qui a totalement délaissé sa fille et arpente le trottoir des putes de jour comme de nuit, même par avis de tempêtes… Bref, je suis dans la chronique sociale qui ne respire pas le grand bonheur ni même l’éclat’ joviale.