dimanche 17 janvier 2021

Comme un Ivrogne dans une Chorale de Minuit

Comme un ivrogne dans une chorale de minuit, je ferme les yeux envahis par la tristesse et la poussière de cette chambre. L'ombre de la lune s'éteint le temps d'une chanson, d'un disque qui a tourné en boucle l'ombre d'une nuit sur ma platine. Les images qui défilent sont en noir et blanc, un verre, une fille, une ampoule nue au plafond, les volets restent fermés, la poussière emprisonnée, la fille est nue aussi, le verre lui est vide.

Des images tournent dans ma tête, comme ce disque autour de son axe. Une guitare fredonne quelques accords mineurs qu'un majeur s'éveille. L'ambiance est sombre, presque froide, la poussière colle à la peau comme le parfum emprisonné dans ta goutte de sueur. L'atmosphère d'un second album, noire comme une vieille photographie d'un autre temps, usée par le temps et le vent. Un air qui fit les beaux jours de la country, trois minutes et vingt-huit secondes pour qu'un oiseau s'envole de sa cage de Nashville, pour qu'il s'enfuit de cette chambre au spleen gluant et qu'il se pose sur un fil.

 

Comme un cowboy sans monture, j'erre dans la nuit, désir nocturne du héros solitaire, fais voler la poussière d'un coup d'éperon, pénètre l'antre de ce saloon, un verre au bout d'un comptoir qu'un bedonnant s'empresse de me servir, comme s'il connaissait les désirs d'un vieil imprévisible poussiéreux. Une jeune femme à la lumière tamisée mais au sourire bandant garde ses distances à l'autre bout du comptoir, la tristesse se contaminant aussi vite qu'un virus. La mélancolie d'une vie s'épanche dans cette lueur comme les traces collantes d'une décennie de verres sur ce comptoir. La petite mélodie trotte dans ma tête, une ritournelle qui ne s'oublie pas, même pas dans la sombre vie du solitaire.

"Songs from a room", Leonard Cohen.



8 commentaires:

  1. Bison. Oui, cet univers cohenien te convient et te happe. Moi, moi, comme un oiseau sur le fil, j'ai acheté ce vinyl du temps sans K7, sans CD, sans plateforme. Je ne m'en suis jamais remis tout à fait. Spleen et chambre solitaire, étreintes furtive😢s et culpabilités, quelques verres au Chelsea Hotel, les réminiscences de Suzanne et Marianne, tout y est. Mais il y a si longtemps, l'ami. Tiens...https://youtu.be/Ch78v0ssYj0 🎶 (du même album).
    Ton billet est magistral. J'ai beaucoup fréquenté Leo. Toi aussi. Et parfois je l'ai un peu délaissé. J'ai bien fait car Leo, c'est aussi une bonne dose de toxicité. Evidmment j'y reviens. Merci Bison pour cette émotion.

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    1. Quel beau commentaire ! Merci...
      Et tu vois, j'avais chercher un second extrait live, je voulais Nancy, mais je ne l'avais pas trouvé... J'ai mal cherché, le live m'attendait juste là, à portée de guitare.

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  2. Les deux premiers albums de Cohen sont parmi les tout premiers albums que j'ai achetés, il y a... longtemps. Et j'y reviens toujours.

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    1. Je comprends tout à fait. On revient toujours sur Léonard Cohen. C'est comme une belle histoire d'amour qui ne s'oublie pas. Jamais.

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  3. Aaahhh Leonard Cohen un pan de ma vie !

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    1. bah tu es encore trop jeune pour parler d'un pan de ta vie...

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  4. Bird on the Wire est une chanson phare... écrite et chantée pas loin d'une année érotique. So long Marianne, RIP Leonard, tes mots me font vivre et vibrer <3

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    1. une chanson phare qui illumine par une nuit sombre et obscure les âmes perdues...

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