mardi 27 juin 2017

Celles qui voulaient…

Depuis sa sortie en salle, je rêve de voir ce diptyque, conçu au départ comme une mini-série en 5 épisodes à la télévision japonaise. Cinq années qui se sont écoulées et qui m’ont obsédé, cinq années durant lesquelles je me posais ces deux questions à chaque tasse de thé :
1. Qui sont celles qui voulaient se souvenir ?
2. Qui sont celles qui voulaient oublier ?


Kiyoshi Kurosawa, avant tout renommé pour ses films d’horreur et surnaturels, dans le genre « terrifiant » et « creepy », à en hurler un cri interminable (de jouissance ?), vient ici avec un autre état d’esprit, inquiéter par le mystère. Il fait de ce Shokuzaï un thriller hautement psychologique qui interroge l’âme des hommes et des femmes en l’occurrence, puisqu’il n’y sera question que de « celles ».

Elles sont donc cinq. Cinq petites filles que l’innocence de l’âge s’arrêtera nette en cette fin d’après-midi, dans le terrain de sport de ce petit village de campagne. Elles sont en train de jouer, à la balançoire, à la marelle ou à la corde à sauter, je ne sais plus, des jeux de petites filles. Un type demande un petit service à l’une d’entre elle. Innocent que je suis, je me dis quand même qu’il a l’air un peu louche le gars. Pourquoi elle, d’ailleurs ? Pourquoi pas moi ou toi ? Elles se poseront cette question toute leur vie, hantées par une réponse qui ne viendra jamais apaiser leur souffrance. Emili vit ses derniers instants, alors que le soleil n’est pas encore couché, violée et sauvagement assassinée dans le gymnase désert. Elles l’ont toutes vu mais ne disent rien, ne se souviennent pas de la tête de l’assassin. La mère d’Emili, entre tristesse et colère, les maudira. Elles ne se déferont jamais de cette malédiction maternelle.


« Retrouvez le visage du tueur de ma fille,
sinon vous n’échapperez pas à la pénitence. »

Le polar est lancé. Je me retrouve quinze ans après. A tour de rôle les filles vont ouvrir leurs vies, des vies que l’on sent totalement perturbées par ces années depuis le drame. Entre la culpabilité obsédante ou la perte d’identité sexuelle, elles restent vivantes mais totalement perdues, entre névroses et douleurs. Comme les hommes qui croisent la route de ces nanas-là, réduits la plupart du temps à d’uniques objets sexuels pour des nanas qui n’ont plus cette notion d’amour. Le film est un mélange de terreur qui se noie dans le drame sombre et l’humour noir. Il y a du cynisme, beaucoup même, et aussi un soupçon d’étrangeté et de mystère autour du coupable et de ces fillettes qui ont basculé, un jour d’été, de l’enfance à l’horreur.

Du grand Kiyoshi Kurosawa, un côté sombre et fascinant, une histoire obsédante et malsaine. Flippant.


« Shokuzaï » [2012], Kiyoshi Kurosawa.



15 commentaires:

  1. Terrible ! Et ça me tente, forcément !! ^^

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  2. Bonjour le Bison, ce dyptique vu en salle en 2013 (les deux à la suite) m'avait emballée, surtout les deux premiers. Les trois derniers quarts m'ont paru un peu long mais à voir. http://dasola.canalblog.com/archives/2013/06/18/27397342.html Bonne journée.

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    1. Moi, je n'ai pas ressenti cette longueur, mais je l'ai vu aussi en deux soirées, une pour chaque DVD.

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  3. Ah ce criiiiii. Rien que pour lui le film est innovant. Qui a osé un tel cri... ???

    Et les petites jouent au ballon. Un truc de mecs non.
    Du coup je ne me souviens plus des détails et du comment elles s'en sortent... Ça en fait des films à re-voir.

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    1. Finalement, elles jouent à la balle. Un truc de filles, non ?! :-)
      Autant de films à voir et re-voir que de livres à lire et re-lire ou de bières à boire et re-boire et re-re-reboire....

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    2. Finalement elles jouent et c'est un truc d'enfants.

      Oui parfois je me demande pourquoi on re re re voit lit boit ? Un truc de barges non ?

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    3. un truc totalement ouf, ces re et ces re...

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  4. Comme j'ai envie de voir ce film!
    Un film dur, c'est certain, déchirant et douloureux.
    Facile de perdre la notion de l'amour quand tout bascule et qu'on s'y était accrochée... et qu'on y avait crue...
    Impossible pour une mère de se remettre de cette épreuve.
    Tabarnak de vie parfois!

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    1. Sacrément dérangeant, même : :-)
      Un film tout en douleur et en émotions contenues. Des vies sombres, des tabarnak de calisse de vie...

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  5. J'ai adoré et eu une petite préférence pour la première partie... (Goran : https://deslivresetdesfilms.com)

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    1. Pas de différence entre les deux parties. A prendre ou à laisser. J'aime les 2 ou rien ;-)

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    2. Alors les deux :-) (Goran : https://deslivresetdesfilms.com)

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