Imagine, un musée, celui de Grenoble ou celui d’Orsay, et là la lumière, celle de l’ampoule de la guérite du gardien, celle de Pierre Bonnard, les couleurs de la lumière. Tu te plantes devant un tableau, tu regardes, une pointe par ci, une pointe par là et la lumière t’éblouit, et la femme nue, par bonheur, pur bonheur, t’éblouit.
« La couleur est une femme qui se gagne lentement, regard après regard, caresse après caresse. On sait tout de suite que ce sera long, un combat sans cesse recommencé avec la lumière. Et qu'il faudra souvent faire mine de baisser les bras, de quitter le champ et de se retirer dans l'ombre, le silence, la solitude. »
Elle s’appelle Marthe, ou Marie, peu m’importe, c’est la Muse, celle de Pierrot qui la croise au détour d’un quai ou d’une rue, et qui s’en trouve bouleversé à jamais. Imagine cette rencontre, l’artiste et le modèle, le peintre et la femme nue, toujours nue. Dans la salle de bain, sur un canapé, dans son lit. Pas besoin d’une lune bleue pour l’inonder de bonheur, juste un sourire, un regard et l’amour qui vient. La passion, les caresses, le silence. C’est ça l’amour. C’est ça la peinture, c’est ça, les couleurs de la lumière, ce mélange chaud de passion et de caresses qui se posent sur une toile.
Ferme les yeux devant le tableau, et imagine ce dessein… Imagine ce sourire, cette beauté. Imagine cette nudité. Je ne connaissais pas Pierre Bonnard, avant ce roman, inculture généralisée. Je le connais un peu, maintenant, j’ai été voir des tableaux, j’ai senti cette femme nue au parfum de jasmin ou de coquelicot, j’ai fermé les yeux, et je l’ai gardé en moi, comme un silence intérieur qui réchauffe l’âme.
« Pierre sait déjà et ne sait pas encore que cette jeune femme qui se réchauffe dans ses yeux va l'entraîner jusqu'au bout de lui-même. Il sait déjà et ne sait pas encore que l'eau, quand elle monte d'un regard de femme, peut tout renverser, et qu'il n'y a pas de mur qui tienne, surtout si le mur est un homme qui vit et vibre dans l'azur comme un violoncelle. Il sait déjà et ne sait pas encore que l'eau est première et femme et nue, qu'en elle toutes les couleurs se lavent de la nuit et fleurissent dans la lumière. »
Une écriture poétique et sensuelle qui se déguste en une nuit, ou en un verre, sous la lumière d’automne, du jaune, de l’ocre, du soleil et une femme, belle et nue, qui enlève ses bas noirs, après l’amour, ou avant, qui s’allonge et pose à mon regard triste, repose ses courbes nues et parfumées à mes fantasmes silencieux. J’aurais dû être peintre, voilà ce que me dit mon subconscient, j’aurais trouvé ma muse et l’aurais croqué sur un air envoutant de violoncelle, ses fesses ses seins, la lumière d’une vie.
« Pourvu que Pierre la regarde encore et encore et la fasse fleurir nuit après nuit, Marthe consent à être nue devant lui et prise, surprise, dessinée
Nue sur le lit juste après l’amour, voluptueuse encore, indolente, une main caressant le sein où le plaisir longuement s’étire,
Nue à demi enfilant ses bas et tournant la rouge jarretière, la jambe prête aux pires écarts,
Nue aux bas noirs sous la lampe et plus que nue, la tête prise dans l’écume des chemises, et livrée aux rougeurs,
Nue à la baignade, nymphe penchée sur le miroir d’eau… »
« Elle, par bonheur, et toujours nue », Guy Goffette.
« Brune encore non eue,
Je te veux presque nue
Sur un canapé noir.
Paul Verlaine. »
J'avais beaucoup aimé la délicatesse de ce court roman biographique... La délicatesse surtout dans l'expression de la sensualité et de l'érotisme.
RépondreSupprimerMoi, ça m'a permis d'aller fureter sur le net la peinture de Bonnard que je ne connaissais pas du tout... Merci.
SupprimerJe n'avais pas toutes les références lorsqu'il parlait d'autres peintres, mais il est vrai que l'écriture est belle, en délicatesse et en sensualité...
Et pour tes prochaines vacances à Gre au lieu de fureter sur le net va au musée... tu vas adorer l'expo Bonnard. De mon côté je note le livre trop avant de le découvrir. Merci ;)
Supprimerce roman, une idée originale de prolonger l'exposition...
SupprimerEnfin, moi non plus je ne connaissais pas ce peintre avant ce livre.... ;-)
RépondreSupprimerUne belle exposition au musée de Grenoble, mais ça fait un peu loin...
SupprimerAh, bien ! quand tu redescendras dans ta région alors ;-)
SupprimerMoi, je connaissais Bonnard mais pas Goffette...
RépondreSupprimerni l'un ni l'autre... donc double découverte, belle découverte...
SupprimerGuy Goffette, j'étais en Belgique en 2010 quand je l'ai découvert. Un été autour du cou, le titre. Une femme nue sur la couverture, comme ici.
RépondreSupprimerElle est belle cette nudité de Pierre Bonnard. Elle réchauffe l'âme et le corps. Un antidote au frette de l'hiver, du blizzard...
Une femme nue, la Belgique... là, c'est un de mes fantasmes qui se joue avec la bière qui coule, qui coule... j'ai déjà le corps et l'âme chauffés à blanc...
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