« - Tu as lu Hemingway ?
J’avais à peine lu Hemingway ou je l’avais lu n’importe comment, et l’idée que j’avais de l’écrivain américain se résumait en un lamentable cliché dont le protagoniste était un vieux au bout du rouleau, dévergondé et alcoolique, ami de danseuses de flamenco et de toreros, qui véhiculait dans ses œuvres démodées une image d’Epinal de l’Espagne constituée de stéréotypes les plus rances et les plus insupportables.
- Oui, ai-je répondu, soulagé par cette lueur de conversation littéraire et comme je devais voir là une autre magnifique occasion d’annoncer clairement à mes collègues de faculté mon inébranlable vocation cosmopolite – que j’avais déjà affichée par mon commentaire homophobe sur le cinéma d’Almodovar – j’ai ajouté : Pour moi franchement, c’est de la merde. »
La première partie du roman m’entraîne dans une université américaine de l’Illinois. Tu connais Urbana. Bien sûr, souviens-toi. Je ne te ferais pas l’affront de te raconter le film qui a donné ses lettres de noblesse à ce trou du cul de l’Illinois où même une Marylin Monroe dans sa splendeur ne réussirait pas à réchauffer les cœurs de ces péquenauds. Certains l’aiment chaud. Au début, Jacques Lemmon et Tony Curtis doivent donner un concert dans une ville glaciale du Middle West. Mais poursuivis par quelques gangsters, ile filent en Floride déguisés en choristes. Eh bien Urbana, c’était cette ville où ils n’iront jamais préférant s’encanailler sous le soleil de la Floride. De là à en déduire qu’il fait meilleur en Floride qu’à Urbana… Sauf qu’à Urbana, il y a une bonne université avec un département de langues étrangères portant sur la littérature espagnole et des cours donnés en catalan.
Urbana, première partie, un écrivain débutant s’y installe, version imaginaire et romancée de l’auteur en personne, Javier Cercas. Il y croise notamment un vétéran du Vietnam et se lie d’amitié au cours d’échanges sur la littérature, dans un bar où si le premier prétexte fut de causer catalan, le second était de s’enfiler quelques bières dans une ambiance éclairée d’un comptoir de bar… en écoutant ZZ Top... et moi, je m'y vois très bien dans ce bar, à m'y sentir à l'aise, barbus et grosses guitares, serveuses et grosses poitrines, le genre d'endroit où je m'y reposerai bien éternellement (aussi bien accoudé au comptoir qu'entre les miches de la serveuse).
Mais je n’ai pas envie de t’en dire trop – pour une fois. Porque ? Parce que j’ai adoré, tout simplement. Alors comment te faire aimer ce roman, te donner envie de faire l’amour avec ce livre ? D’autant plus que je sens cette pointe de frustration, Javier Cercas, mi-estremadurien mi-catalan, signe ici un roman plus américain qu’espagnol. Alors toi qui voulais flirter avec les catalanes, tu devras de te satisfaire des universitaires de l’Amérique profonde. En contrepartie, la moitié du roman se passe à Barcelone. On ne danse pas le flamenco, là-bas ?
« Tout commença le matin où sa compagnie se rendit dans un village proche occupé encore la veille au soir par le Viêt-công. L’incursion du Viêt-công visait à recruter des soldats, et dans ce dessein les combattants sollicitèrent l’aide du chef du village, qui se montra rétif à collaborer. La réponse des combattants fut si foudroyante qu’il était déjà trop tard quand il voulut changer d’avis : ils prirent ses deux filles, de six et huit ans, les violèrent, les torturèrent, leur tranchèrent la gorge et jetèrent leurs cadavres mutilés dans le puits qui ravitaillait le village en eau potable, pour la contaminer. »
Il est question d’histoire d’amitié, forte, de liens qui se créent et qui attachent les âmes sans que l’on sache pourquoi, et malgré les dédales de la vie. Que l’on soit dans l’Illinois ou en Catalogne, l’esprit de cet ami hante celui de l’auteur qui n’est plus un débutant et qui a acquis même une certaine notoriété. Un roman sur les écrivains, sur la peur de la page blanche ou la page remplie de banalité. Un roman fait pour moi, parce que surtout il m’a rappelé les premiers romans de Paul Auster. Je te le dis, avec « à la vitesse de la lumière », j’ai des pages de littérature américaines avec sa guerre du Viêt-Nam et la musique de Van Morrison. Oui, il faut lire ce roman pour ses longues digressions sur les atrocités de cette putain de guerre, et pour écouter en boucle la voix écorchée de Van Morrison sur « Astral Weeks », une bouteille de vin, deux verres et ma putain de vie.
Urbana, dernière partie. Le roman s’achève. Je suis presque triste de le finir, je n’ai pas envie de passer à autre chose. Pourtant, il faut tourner la dernière page. Et me dire que tout n’est pas fini. Bien au contraire. C’est la vie. Qu’elle soit en Catalogne ou dans l’Illinois. La bière a le même goût, mais le ballon pas la même forme. Qu’il sera difficile de passer à autre chose. Ce roman était pour moi, mais pas sûr qu’il le soit autant pour toi. Question de goût et d’humeur, comme de littérature.
« Dans un roman, ce qui n’est pas raconté est toujours plus important que ce qui l’est, m’a-t-il dit un jour. Je veux dire que les silences sont plus éloquents que les mots, et que tout l’art du narrateur consiste à savoir se taire à temps. »
Le bison est de retour et qui plus est avec un super critique… J'adore ! Pourquoi ce nouveau site si ce n’est pas indiscret ? Si ça l'est, tu peux supprimer ma question du commentaire…
RépondreSupprimerL'envie ou la non-envie, l'envie de créer de nouveau et la non-envie de poursuivre le ranch comme d'abandonner une vie.
SupprimerComme le serpent a besoin de changer de peau, le bison change de poils. Il sera peut-être de mauvais poil ou se mettra aussi à poil...
À poil...... shi.........je crains le pire!!! ^^
Supprimerlaisse tranquille, ton majeur, y'a pas de quoi l'émoustiller, même à poil !
SupprimerDes Mémoires de Bison et des poils..... on ne va pas s'ennuyer ici :D))
RépondreSupprimerQuel bonheur de te retrouver, il suffisait de suivre les pas de tes sabots plein d'poussière! ;-)
Tu reviens en pleine forme avec ton beau billet qui goûte le Skool!
Tabarnak, penses quand même à respirer entre les "joes" de la serveuse! ^^
Crisse, j'espère que tu ne t'ennuieras pantoute par ici. Un bison qui se met à poil, je ne sais pas si je vais attirer du monde....
SupprimerJe reviens surtout avec un beau livre de Javier Cercas, mon Paul Auster espagnol.
Entre les joes de la serveuse et les roberts de l'autre serveuse, je veux bien retenir ma respiration et m’enivrer de cette ivresse. Pourvu qu'elles pensent au bouche-à-bouche pour me ranimer...
Si tu peux passer un coup de balai, y'a plein de poussières partout et j'ai pas eu le temps de m'y mettre, y'a la voisine qui prenait un bain de soleil sous le grand érable argenté. Que j'aime l'été indien, pour ce soleil et ces idées lubriques.
Tabarnak! Avec un string aussi mini que le short, elle risque quand même de prendre un p'tit coup d'froid! ^^
Supprimer"Si tu peux passer un coup de balai"... pffffffffffff !!!!!! Et il va rajouter que j'y mets pas du mien!!! Pouahhhhhhh
ça râle pour pelleter la neige
Supprimerça râle pour ramasser les feuilles mortes
ça râle pour passer un p'tit coup de balai
mais avec l'accent, ces râleries doivent avoir son charme :D avec ou sans string ! :D
On sent qu'il t'a plu ce bouquin, ça fait plaisir à lire...
RépondreSupprimerEt content de te retrouver ici, même sans lait-fraise ! :)
Un très grand roman.
SupprimerQu'est-ce que je te sers, la grenouille ?
Un Bailey ?? ^^
SupprimerUn Bailey pour la grenouille, ça marche. Je demande à la serveuse aux gros seins de te l'apporter immédiatement...
SupprimerGrande classe Ton Nouvel Horizon, et que dire de ton billet ... Ben je suis jalouse !
RépondreSupprimerBravo Le Bison ;-)
jalouse... je me demande bien de quoi... pas si classe que ça mon nouvel horizon, mais il reste fidèle aux alcooliques et autres amateurs de poils...
SupprimerEuh ! je peux un Bailey aussi sieuplait ? :)
RépondreSupprimerBen co !!!! ;-)
Toi aussi, tu veux voir la serveuse aux big "joes" !!!
SupprimerNon, elle veut un serveur à grosse..................... ^^
SupprimerPfffftttttttt
SupprimerEt pas queue ;-) ptdrrr ^^
Tiens, le blog du Bison a hémingwé.
RépondreSupprimerPouf pouf.
Hémingwé, Excellent ! Enfin, j'ai jamais lu, mais j'ai bu, comme l'écrivain ! :D
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