dimanche 29 janvier 2017

Vague à l'âme, Peyotls et Cowgirls

J’enlève mes santiags toutes poussiéreuses avant de pénétrer l’antre du ranch de « la Rose de Caoutchouc ». C’est que je tiens encore un peu, si peu, à ma vie qu’il serait dommage que je me fasse estropier, flinguer, castrer par la renommée Bonanza Jellybean. Elle tient d’une main de maîtresse ce ranch où, bonheur des yeux et des culs, seules des cowgirls sévissent dans ce lieu de fantasmes et de peyotls.

Sissy, de longues jambes, un pouce démesuré à Richmond, Virginie. Défaut majeur dans sa plasticité certes, mais c’est le stetson vissé sur sa crinière qu’elle va user de son appendice et de son charme pour sillonner les routes d’Est en Ouest, du Sud au Nord, version autostop. Ça a du charme l’autostop, et je n’hésiterai pas à arrêter mon pick-up pour la prendre dans ma cabine hurlant le vague à l’âme de Johnny Cash.

« South Richmond était un quartier de trous de souris, de rideaux de dentelle, de catalogues de chez Sears, d’épidémies de rougeole et de sandwichs au salami où les hommes s’y connaissaient plus en carburateur qu’en clitoris. »

Ce roman de Tom Robbins fera des étincelles dans ma tête, dans mon esprit, dans ma libido. A chaque page, son image, son délire. L’auteur abuse des substances hallucinogènes. Sous quelle forme ? Champignons, entre autre, mais pas que, tant son imagination totalement débridée épouse un univers totalement déjanté. Depuis que j’ai tourné ces pages, je rêve chaque nuit de cowgirls, je rêve de leur pays une bière assis au comptoir, elles les longues jambes croisées dans une minijupe bien serrées, moi les yeux dans le vague, l’âme dans la vague, rêve d’une vague de whisky qui viendrait me fouetter le visage de son embrun iodé.



Il y a des romans qui illuminent votre vie ou votre trajet de métro. Celui-là en fait partie. Ne serais-je pas un peu fou de me prendre pour un cowboy, ou pour sourire seul face à ce livre… Mais pas aussi fou que l’auteur… Le soleil décline vers d’autres pâturages, j’ai envie de me faire une omelette aux peyotls, je me souviens du sourire d’une cowgirl, et j’écoute le silence de ma putain de vie que le vent emporte au loin.

« Elles étaient dans les collines, à présent. Le soleil baissait. Emportant son tambourin sous le bras, le vent rentra chez lui pour dîner. L’herbe perdit le tempo et se recoucha. Une solitude américaine qui n’est pareille à aucune autre solitude au monde, se répandait tout autour de la Cadillac, sortant du sol qui se refroidissait et de l’air même. Une solitude d’une douce puanteur, rouge comme les pieds d’un représentant fatigué que ses chaussures font souffrir ; une solitude aux relents de sueur, de bière et de frites ; une solitude hantée par des rêves d’enfance et des fantômes d’Indiens – un isolement de crépuscule qui se love comme un serpent de brume surgissant de la valise cabossée du continent américain. Et la limousine traversait le silence comme une fraise de dentiste. »
  
De drôles de rencontres, un chinetoque un peu gourou, un psychiatre excentrique, un fabricant de déodorant, un indien loin de ses racines, des cowgirls lesbiennes, parsèment de son humeur sulfureuse et jasminée la vie de Sissy ; et par conséquent mon voyage littéraire inclassable. D’ailleurs comment se refuser un tel enivrement de mots, de whisky et de pensées saugrenues à sauvages aussi aphrodisiaques qu’une cowgirl en complet-3S, string stetson et santiags. Toute ma philosophie, le sky et le string, et maintenant les cow-girls avec du vague à l’âme.   

« Elle portait un Stetson tanné orné d’une marguerite, une chemise de satin vert brodée d’étalons cabrés aux naseaux crachant des flammes orange, un foulard, un boléro d’un cuir aussi blanc qu’un cadavre, une jupe du même cuir cadavérique et si courte que si ses cuisses avaient été les aiguilles d’une pendule la jupe aurait été à minuit moins cinq, et une paire de bottes Tony Lama travaillées à la main dont la pointe était si effilée que vous auriez pu vous curer les dents avec. Des éperons d’argent étaient fixés à ses bottes et, ceignant sa taille mince, juste au-dessous son petit ventre dodu, une ceinture cloutée de turquoises, d’où pendait un étui et un habitant d’étui, un authentique six-coups au canon long comme des mauvaises nouvelles de la clinique. Elle montrait des cuisses de miel en marchant, ses seins rebondissaient comme des petits pains gonflés à l’hélium et, entre des joues rouges dont la tendre chair prenait son temps pour mûrir, elle affichait un petit sourire qui avait de quoi rappeler aux minéraux et aux plastiques leurs anciennes origines vivantes. »

Un grand merci au têtard charentais pour cette aventure si extraordinaire dans les mares du Dakota, là où des cowgirls aux jambes aussi effilées que mon dard dressé prennent des bains de pieds pendant que je mange mon sandwich au salami.


« Même les cow-girls ont du vague à l’âme », Tom Robbins.

14 commentaires:

  1. Pourquoi je ne trouve jamais de telle perles dans les vides greniers. Pourtant les Charentes c'est un un trou perdu ;-)
    C'est pas juste moi je dis ! De quelle année date ce roman ?
    Une bonne pioche pour toi et le têtard !
    Un sandwich au salami ... mouais ! je préfère avec du saucisson :)

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    1. Je suis d'accord avec toi : les Charentes c'est un putain de trou au milieu des champs et pourtant qu'est-ce que les vides greniers sont riches en perles littéraires. Mais ces bouquins arrivent jamais jusqu'aux vide greniers de Dordogne, sa voisine.

      Le roman, quand à lui est presque aussi vieux que toi. 1976, c'est dire de sa puissance et de sa force. L'effet cowgirl, certainement. Une nouvelle édition est sortie - y'a trois quatre ans - aux éditions Gallmeister avec probablement une nouvelle traduction Mais celle-là, avec son papier jauni par la poussière du Dakota est déjà merveilleuse et magique, hallucinatoire même. Omelette aux peyotls pour le petit déjeuner ?

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    2. Je suis quand même allée vérifier ce qu’est exactement "peyotls" !
      Euh je crois que ça va aller ... ;-)
      Mais une chouffe je dis pas non :)

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    3. Ça aide à voir la vie plus bleue (ou plus rose) mais peut-être n'est-ce qu'un leurre pour oublier les putains de vie...

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  2. J'ai vu le film avec Uma Thurman, mais pas lu le livre... (deslivresetdesfilms)

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    1. Pas vu. J'aime beaucoup Uma Thurman mais le roman est si déjanté que j'ai eu du mal à croire à son adaptation. Tant de folie sur chaque page peut elle être retranscrite à chaque plan ?

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    2. Je sais pas :-) mais j'ai moyennement apprécié le film...

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    3. C'est ce que j'imaginais bien... Mais le roman de Tom Robbins est totalement jubilatoire, de la première à la dernière page. un Incontournable de la littérature américaine.

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  3. Ah,c'est du bon ça monsieur.Un inédit à sortir bientôt chez Gallmeister.

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    1. Je viens de voir effectivement.
      Nature morte avec Pivert, sortie le 02 Mars...

      "Subversif et incroyablement prémonitoire : apologie du hors-la-loi, cantique des cantiques de la tequila, remarquables recettes de bombe. Lucide et revigorant !"
      Putain ce que ça a l'air bien... Faut que j'achète de la Tequila !!!

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  4. Hé, les deux, là-haut, vous savez ce qu'elles vous disent les Charentes ???!!!....^^
    Euhh sinon, on m'a dit que tu es très doué en carburateur...

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    1. Si seulement... au moins, je pourrais me vanter de quelque chose dans ma vie mais je ne maitrise pas autant le carbu d'un Massey-Ferguson que toi...

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  5. Le « têtard charentais » PTDRRRRRRRRRRRRR doit pas y avoir beaucoup de chair à croquer sur des cuisses de têtard, quel gâchis!!!!!!!! mdrrrrrrrr ^^
    Elle est bonne celle-là!!!! Crôaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaa

    Un livre pour nourrir ta libido, c’est qu’il trouve des merveilles c'têtard !!! ^^

    Entre les tracteurs, les bouses de vache et les mares à grenouilles, un têtard est né... PTDRRRRRRRRRRRRRRRR

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    1. C'est qu'il a l'air de s'y connaître, le tétard, pour nourrir mon esprit libidineux... Y'a de sacrés trucs quand même dans les brocantes des mares aux grenouilles... Faut juste faire attention dans la déambulation des rayons, de ne pas écraser de ses sabots crottés une grosse bouse bien fraîche...

      Mais putain, quel bouquin ! Jubilation garantie.

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