dimanche 9 avril 2017

Marathon Boy

« Que la fraicheur de la rosée apaise votre âme, messieurs ! »
 
Commencer à courir. Pieds nus. Avoir du mal à respirer. Sentir une brûlure dans la gorge. S’arrêter. Souffler, essoufflé. Sentir ses cuisses brûler, cramer. Aussi dures que de la pierre. Ce n’est que l’apprentissage, petit, de la course à pied. Il ne mettra pas longtemps à rattraper son grand frère. Il faisait l'éloge de la lenteur et de la paresse, il découvrit que courir lui procurait de nouvelles sensations. A sentir le sol, cette terre, celle de ses ancêtres, de son peuple, de sa vie, foulée par ses pieds, il fuit, s'enfuit, pour échapper aux représailles de l'envahisseur nippon. Le Japon a annexé la Corée. Le Japon contrôle la Corée. Le Japon maltraite la Corée. De son plus jeune âge, il voit ce virulent opposant qui règne en maître sur son territoire, sur celui de ses parents. Il est l'esclave des japonais.

Depuis, il ne cessera de courir. D'abord pour aller chercher chez le voisin chinois des melons pour les vendre ensuite aux japonais, avant de s'asseoir à la table de son école, les yeux fatigués par cette folle chevauchée matinale – il faut dire qu'étudier le japonais n'est pas dans ses priorités. Il s'entraînera, encore et encore. Jusqu'aux jeux olympiques de Berlin de 1936, organisés par l'ami Hitler. Le Japon voudra faire de ses jeux une fierté nationale, quitte à enrôler des non-japonais dans l'équipe nationale. 

Et Kee-chung remportera la première médaille d'or de la Corée au marathon... sous un nom d'emprunt japonais, sous la bannière japonaise... Sur le podium, le regard se mêle de honte et de haine.


« Quand on courait, il n’y avait plus de Japonais. La terre qu’on foulait n’appartenait à personne, même si la conviction profonde de Kee-chung était que cette terre, sous ses foulées, redevenait coréenne. Il se trouvait de plain-pied avec son pays, traçait de nouvelles frontières tout en s’imaginant lutter avec l’ennemi. »

 Quel roman jeunesse ! De la fougue, de l'Histoire, de la tristesse et des émotions.
2 h 29 mn 19 s. Nouveau record olympique. Kee-chung devient héros national, héros de la résistance coréenne. Sa légende rentrera dans l'histoire. Il connut l'invasion japonaise, il connaîtra la séparation des deux Corées, et son exploit restera à tout jamais dans la légende du marathon et dans l'histoire des grands personnages de la Corée.

« A quoi correspond la distance d’un marathon ? A 105 tours de stade ! 105 ! Rien qu’une question d’obstination. Comme la vie. Voilà surtout ce que j’ai enseigné à mes élèves. Ils étaient trop jeunes pour savoir que l’existence se résume à notre capacité à lutter contre le temps, contre la répétition. Le marathon vous l’apprend. Mais la limite est fragile entre l’obstination et la folie, voilà ce que je retiens de toutes ces années. »

Le Garçon qui courait, François-Guillaume Lorrain.

Le Garçon qui Courait, une masse critique Babelio avec les éditions Sarbacane
Le Garçon qui Courait, une histoire d'âme et de course. Marathon Man...

10 commentaires:

  1. Je l'ai repéré à sa sortie celui-ci, il avait l'air pas mal du tout et tu confirmes...

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    1. Le sujet m'intéressait déjà, et quand je l'ai vu dans ton pense-bête, je me suis dit que soit tu devais avoir eu de bons échos du livre ou de l'auteur. J'y ai passé un super moment, aussi bien culturel que sportif, des émotions, de la fatigue, des peurs, et de la rage...

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  2. Un roman jeunesse !!
    Ben tu vois quand tu veux !
    Pas si vieux finalement ;-)

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    1. la vieillesse est dans la tête et le cœur, et à l'intérieur, je dois me sentir plus vraiment très jeune...

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    2. Tu as finis de te plaindre ou je te botte le C-- pour te donner du baume au <3 !

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    3. baume du tigre. Il n'y a que ça de vrai... surtout à mon âge, pour soulager les cuisses trop lourdes pour me supporter...

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  3. Tabarnak y'a de beaux livres dans les Masses Critiques Babelio!
    Dommage qu'elles ne se rendent pas jusqu'à chez moi :-(
    2 h 29 mn 19 s... la distance que pourrait parcourir un Bison pour atteindre le nuage de Chambly...

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    1. 2h 29 mn 19 s, je suis prêt à le faire pour une bière d'autant plus de Chambly...

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  4. ça a l'air super mais le sport, l'effort, tout ça, ça me fatigue. Même à lire, je sens que ça va m'épuiser...

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    1. Détrompe-toi... Une lecture en rien fatigante, bien au contraire, tant elle est enrichissante. La découverte d'une période d'un pays par le biais d'un gamin devenu coureur de marathon, sa façon à lui de se manifester contre l'envahisseur...

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