mercredi 15 mai 2019

Amour en cage


« Dans la vitrine, je dispose des livres d'occasion que je viens d'acheter. Il est environ quatre heures de l'après-midi. Une neige floconneuse commence à tomber. »

Sur ma table de chevet, je regarde la petite grue en origami, façonnée par de douces mains, précieuses mains caressantes. Je caresse la précieuse couverture d'un roman, pas d'occasion pour le coup. Une lanterne japonaise s'illumine dans ma sombre mémoire, une musique, une guitare, un saxo, me trottent dans la tête. Si profondément que je me demande si cette musique provient de cette vie, ou d'une vie antérieure, d'un passé si lointain. Hôzuki, des physalis couramment appelés Amour en cage – ou Lanterne japonaise. J'aime l'aspect floral des romans d'Aki Shimazaki, qui de ses mains québécoises m'a façonné cette grue et une précieuse dédicace.

Je vois cette boutique de livres d'occasion, l'envie irrépressible d'y pénétrer, corps et âme et m'imprégner de son parfum de philosophie et d'amour. Bien que j'y connaisse rien ni en l'un ni en l'autre. A l'intérieur, Mitsuko... Son sourire me dit quelque chose, fantasme de l'autre nuit dans cette taverne, moi miteusement triste, elle sublimement belle. Dans une autre vie, ou juste le week-end, elle est hôtesse dans cette taverne, si cher à Rufus. Mais le reste du temps, elle est seule à s'occuper de son fils muet. Jusqu'au jour où une femme, disons-le, bourgeoise, pénètre dans la boutique à la recherche de livres de philosophie rares – pour son mari précise-t-elle. Et là, des secrets bien lourds à porter rejaillissent pour bousculer l'équilibre fragile de ces vies.


« - Croyez-vous à la métempsycose ?
Je vois ses yeux mélancoliques :
- Vous voulez dire la réincarnation ?
- Oui. Qu'en pensez-vous ?
La réponse me vient spontanément.
- Je ne nie pas son existence. Mais, y croire, c'est personnel, comme ce qui concerne la religion.
Elle lève les yeux vers le ciel bleu :
- Moi, j'y crois. Je me demande toujours qui j'étais dans mes vies antérieures et qui je serai dans mes vies futures. A chaque vie, je ne suis pas la même personne, mais l'âme demeure la même en changeant de corps, éternellement. C'est comme un collier de perles sans fin. »


Encore une fois, je reste sans voix, quand la voie de l'émotion m'attrape à la gorge. L'envie de boire un verre, de sucer un bonbon au sirop d'érable, d'écouter un air de jazz – Rufus, sers-moi donc un truc qui vient de ton pays, quand je termine la dernière page de ce second volet, après Azami et ses fleurs de chardon. Des physalis dans mon jardin et surtout dans ma bibliothèque, toujours une merveille à chérir comme l'amitié, même si c'est pas mon point fort.

Merci encore.

« J'aime la lecture. C'est tout. »


« Hôzuki », Aki Shimazaki



8 commentaires:

  1. Ils sont tellement poétiques ces "amours en cage", j'adore...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Une magnifique fleur, manU_le Jardinier... J'aimerais bien en voir...

      Supprimer
    2. J'en aurai dans mon jardin... dans quelques mois !

      Supprimer
    3. Alors, j'espère que tu m’enverras une photo de ces lanternes japonaises...

      Supprimer
  2. Il me tarde d'ouvrir Azami !
    Jolie fleur de chardon pas encore éclose, sur ma table de nuit... ;-)

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Les romans de Shimazaki sont juste des fleurs prêtes à éclore... que c'est joliment dit...

      Supprimer
  3. Une sublime auteure, intérieur extérieur, avec son sourire magnifique, généreux, son rire, ses anecdotes... j’aurais voulu capter cet instant lorsqu’elle a façonné cette grue, des éclats de lumière dans les yeux...
    Physallis, Amour en cage (que c’est beau), on les appelle les « cerises de terre », moins poétique mais tout aussi succulentes quand elles t’éclatent dans la bouche.
    Une lanterne s’illumine, une musique classique, je le sens bien, l’odeur des fleurs et le parfum de l’amour. Pour exaucer tes souhaits à la lecture de la dernière page, je t’offre un verre d’ « Amour en Cage », un délice aux cerises de terre. C’est de circonstance... :-*

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. les cerises de terre, c'est joli aussi... d'ailleurs en ce moment, j'en ramasse tous les soirs...

      Merci encore de ce partage québécois. D'ailleurs, elle l'accent quoi ? Genre Anne Dorval ? :-)

      Supprimer