Au temps d'une pandémie et d'un pass sanitaire, Sylvain s'en va battre la campagne de la Meuse à la Reie. Il s'en cours sur les traces de la fugue d'Arthur. La fulgurance d'un poète maudit, Arthur Rimbaud entre deux versants d'une colline, entre deux méandres d'un fleuve. Sous la pluie ou dans la brume, je les imagine tous deux discourir autour d'un verre de bière, une Blanche de Bruxelles, de Namur ou de Bruges. Il est cinq heures du soir au Cabaret Vert.
"La poésie est le mouvement des choses. Rimbaud se déplace sans répit, change de point de vue. Ses poèmes sont des projectiles. Cent cinquante ans plus tard, ils nous atteignent encore. Quand le monde se fige, c'est la mort. Aucune poésie ne survit au formol. Voyez les quarantaines sanitaires."
En fait de bières, il n'en sera jamais question. Ni même de vodka, si cher à mes souvenirs baïkaliens. Il faut dire que le gamin n'est pas en âge de boire. Et que contrairement aux illustres poètes que je peux fréquenter littérairement, Arthur n'a guère besoin d'alcool, de LSD, d'opium ou de mescaline. Arthur, l'être pur, le génie inné qui apprend de ses classiques - donc de ses maîtres - aussi sobrement que moi je m'enfile des bibines. Il voyage à travers les mots, je voyage à travers les houblons. Chacun son passeport pour l'autre monde, celui de l'imaginaire et des lettres.