mercredi 30 août 2017

Listen to the (120) beat


Un cœur qui bat.
120 pulsations par minute.
Listen to the beat,
le son du cœur, rythme une vie, rythme une minute.
120 battements par minute.

Des hommes qui se battent
pour que des cœurs continuent à battre.
Act Up.
Ne pas rester sur le quai de la mort et survivre.
Parler, crier, « hainer ».
Hurler de rage.
Vie de militants au début des années 80.
Faire bouger la vie, ne pas oublier les morts.
Morts du Sida, maladie de fin de siècle.

SILENCE = MORT

samedi 26 août 2017

Conduite Accompagnée

C'est l'été, les fenêtres de la voiture sont ouvertes – j'ai pas pris l'option toit ouvrant – les décibels rivalisent de fureur. De la musique à donf, une voiture à donf. C'est la version « Drive » de l'été. A la place de Ryan Gosling, un jeune conducteur, pas encore l'âge de se raser ou de commander une bière au bar du coin, mais quelle conduite !  
Ansel Elgort (remarqué dans « Nos étoiles Contraires » et aussi un peu dans « Divergente »). Il garde le silence, il a des écouteurs sur les oreilles toute la journée, il me rappelle quelqu'un. Sauf que lui, en plus, manie bien mieux le volant et le frein à main. 
« Baby Driver ».

C'est l'été, le temps des cocktails et de la lenteur, un temps propice à prendre son temps. Pour écouter de la musique ou lire, balancé par le vent dans un hamac. Un temps pour aller à la piscine, ou à la plage. Cool attitude, lunettes de soleil. Ou un temps pour aller braquer quelques banques. Avec des complices d'un calibre bien plus douteux, à l'image de Jamie Foxx, et sous la responsabilité d'un chef d'organisation mafieuse Kevin Spacey. Et lorsque le moteur vrombit et que les watts explosent, je me retrouve à l'état régressif comme un enfant devant une console de jeux vidéo, version Gran Turismo plutôt que Mario Kart. Car ça déménage, l’adrénaline est lancée, elle survole même l'asphalte.

jeudi 24 août 2017

Le Paradis Perdu

« … la mer sommeille, la montagne somnole et le silence règne dans le ciel… »

L’Islande. Dès les premières mesures de ce roman, je m’y suis trouvé. Installé même. Le froid, l’iode. La mer qui me fouette le visage. Le roulis de ce vieux bateau de pêche. Pêche à la morue. Et ce silence. Un silence lourd qui m’envahit. Un silence qui fait partie de moi. J’ai envie d’y aller, « Entre Ciel et Terre » pour ressentir ces émotions, ce parfum, cette poésie de la mer et des landes. Et puis le vent, la pluie glaciale, le blizzard. J’ai oublié ma vareuse. Fuck le blizzard.

« Le vent de la Mer Glaciale souffle, il forcit à chaque minute qui passe et éructe des flocons de neige. »

Le paysage, cette lande islandaise, sauvage et enneigée. Je me retrouve isolé, enveloppé par ce vent sourd qui emporte mes pensées, pas mes paroles muettes. Celles-là, je les garde au fond de moi. Qui voudraient d’ailleurs les entendre ? Quelques moutons sauvages et poilus dans le coin, en train de brouter pour ne pas sombrer dans la froidure de la nuit. Nuits étoilées. Ces étoiles qui sont l’âme des noyés. Et puis ces flocons de neige qui descendent à noyer mon verre, ne serait-ce pas là les ailes des anges ?

« Les hommes n’ont nul besoin de mots, ici, en pleine mer. La morue se fiche des mots, même des adjectifs comme sublime. La morue ne s’intéresse à aucun mot, pourtant elle nage dans les océans, presque inchangée, depuis cent vingt millions d’années. Cela nous apprend-il quelque chose sur le langage ? »


samedi 19 août 2017

La Ballade (pas si bucolique) Islandaise

Un bébé qui mâchouille et bavouille pour se faire les dents… C’est mignon comme tout… Surtout quand on se rend compte que ce qui lui sert pour faire les dents ressemble à un os… humain… une côté fêlée… Un os remonté à la surface dans le terrain d’à-côté suite aux travaux de construction d’une nouvelle résidence. Reykjavik est en pleine expansion, qui aurait cru que la ville se serait étendue sur ces terres sauvages… Erlendur doit se rendre sur place, plus préoccupé par le sort de sa fille, retrouvée dans une piaule à drogués. Et si j’appelais un archéologue pour qu’il m’en dise plus sur ces ossements ? Fatale erreur. Il ne sait pas comment travaillent ces archéologues, avec pince à épiler et petit pinceau pour nettoyer la terre. A ce rythme-là, je vais avoir le temps de finir mon pack de bières, et de voir des trolls danser autour de moi. Une cuvée des trolls, l’esprit un peu islandais.

« il lui avait caressé la joue avec la lame de son rasoir. »

Pendant ce temps, Erlendur réfléchit, à sa fille et à ces groseilliers sauvages sur la parcelle d’à-côté. Est-ce qu’il y a vraiment des groseilliers sauvages qui poussent sur la lande islandaise ? La réponse à l’énigme doit se trouver là. Quelqu’un a une recette de confiture de groseilles ? C’est que les travaux des archéologues ont à peine démarré, et je sens qu’il va en falloir des jours et des jours, d’attente. Peut-être que je devrais aller acheter une bouteille de vodka ?

jeudi 10 août 2017

Le Facteur ne sonne qu'une fois

C’était dans un bar miteux de L.A. comme on en fait plus. Maintenant, il faut que tout soit propre et aseptisé, même les chiottes et les caniveaux. Je ne sais plus à quelle tournée j’en étais arrivé, les verres vides s’entassaient sur le comptoir. Il devait être minuit, lorsque que le pochtron d’à-côté me sort « tu devrais aller à la Poste, ils embauchent n’importe qui ! ». Me voilà donc à cinq heures du mat’, L.A. s’éveille, un sac en bandoulière, prêt à embarquer pour une nouvelle tournée. Postier suppléant. En-dessous, il n’y a rien. Je suis le dernier maillon de la chaîne de distribution. Si les facteurs se portent pales, parce qu’ils ont trop bu la vieille ou qu’il pleut à averses, je deviens le seul, avec mes chaussures trouées, à affronter les éléments de la nature, les vieilles rombières aux bigoudis et les grosses rombières en peignoir ouvert, l’unique même pour acheminer la dernière étape du courrier.    

Premier roman de Bukowski. A l’époque, il n’était pas encore tout à fait écrivain mais déjà pochtron convaincu. Il est ce facteur, toujours en retard sur sa tournée mais qui ne faiblit pas, qui ne faillit pas même lorsque des trombes d’eau s’abattent sur sa camionnette, sur ses mocassins, sur sa sacoche. Étonnamment, il met du cœur à l’ouvrage et de l’humanité à cette tâche ingrate. Des rapports pleuvent sur le bureau de son supérieur, malgré tout il garde son humeur et continue sa besogne coûte que coûte, comme un sacerdoce. C’est comme baiser une grosse au foyer des vieilles rombières, genre qui n’arrive plus à jouir. Il la besogne, la besogne, jusqu’à plus soif, jusqu’à ce qu’elle le supplie d’arrêter.

mardi 8 août 2017

Dans le Blizzard d'un Western


Dès les premières images, je me retrouve immergé dans une tempête de neige, le majeur gelé, pas facile de tirer sur la gâchette. Des flocons de neige épais et lourds s’amoncellent sur mes épaules, poids mort à transporter aussi chargé que ma conscience. Une diligence s’approche. Elle essaye de filer à toute berzingue, vitesse démesurée pour une calèche. Pourtant, je la vois de loin, l’observe longuement. Comme hypnotisé par un générique de film. Elle s’arrête devant moi. A son bord, un gars méfiant et une Dame emmenottée. Je dépose mon flingue, question de confiance ; le type n’a pas l’air commode, la nana plutôt folle sanguinaire avec ses dents en moins et à force de mandales reçues en pleine poire. Ils vont plus loin, avant de n’être emportés par la tempête. Pas de place pour moi, l’ami… Je reprends ma route, on the road again. Sur une route enneigée, le pas de plus en plus lourd.

vendredi 4 août 2017

La Putain de Closingtown

« Belle la putain de Closingtown, belle. Noirs les cheveux de la putain de Closingtown, noirs. Des dizaines de livres, dans sa chambre, au premier étage du saloon, elle les lit pendant qu’elle attend, des histoires avec un début et une fin, si tu lui demandes elle te les racontera. Jeune la putain de Closingtown, jeune. Quand elle te serre entre ses jambes elle te chuchote : amour. »

Closingtown, cela sonne pas très italien, comme patelin. Mais cela sonne comme un film de Sergio Leone. Les flingues sur la tempe. Les flingues dans leurs étuis. L’harmonica siffle, le regard pénètre, le saloon et à l’étage son bordel. Je monte fébrilement, comme quand on descend pour la première fois une bouteille de bourbon poussiéreux et que l’on se demande où l’on est à mi-chemin de la descente. Je joue le timide devant le sourire de la putain. Elle se dévoile dans la pénombre de cette chambre parfumée au patchouli. Bas et porte-jarretelles font de l’effet sur moi, et mon sexe se redresse aussitôt devant cette invitation divine. J’adore le crissement de mes mains sur ses bas, comme celui de la « soie » dans un autre roman d’Alessandro Baricco.       

« Fanny travaille, là-haut, le fils du pasteur entre les jambes. Amour. Le fils du pasteur s’appelle Young. Il a gardé sa chemise, et il a ses cheveux noirs trempés de sueur. Quelque chose comme une terreur, dans les yeux. Fanny lui dit Baise-moi Young. Mais lui se raidit et glisse loin des cuisses ouvertes – bas blancs avec dentelles jusqu’au-dessus du genou puis plus rien. Il ne sait pas où regarder. Il lui prend la main et la presse contre son sexe. Oui, Young, dit-elle. Elle le caresse, Tu es beau Young, dit-elle. Elle se lèche la paume de la main, en le regardant dans les yeux, puis elle recommence à le caresser, en le frôlant à peine. Oui, dit Young. Oui. Elle serre son sexe dans sa paume. Il ferme les yeux et pense je ne dois penser à rien. A rien. Elle regarde sa propre main, puis la sueur sur le visage de Young, sur sa poitrine, et de nouveau sa propre main qui glisse sur son sexe. J’aime ta queue, Young, je la veux, ta queue. »  


mercredi 2 août 2017

Le Royaume des Marécages

« Le palais des Marécages, avec ses « domestiques » - des êtres qui ne semblaient qu’à demi humains ! – répugnants, et cependant pitoyables. Hommes et femmes étaient pareillement difformes ; d’âges extrêmement divers, mais généralement avancés ; leur peau avait la pâleur horrible des ventres de crapaud ou de serpent ; ils avaient les yeux creux, affligés et cernés d’ombre ; »

Minuit, dans le jardin du bien et du mal. Deux noirs sont lynchés par des sympathisants à la cagoule blanche. Nous sommes au début de l’année1905 et le Ku Klux Klan a ses entrées dans le domaine universitaire de Princeton. Le lieu de cet épais roman de Joyce Carol Oates, pensionnaire du même collège. Elle connait donc bien les mœurs et son histoire. Et quelle étrange histoire son esprit a fomenté dans les marécages de ses environs. Une histoire de démon et de malédiction centrée autour de la personne de Woodrow Wilson, président de l’Université de Princeton, avant qu’il n’engendre des fonctions bien plus hautes et méritantes.

« Les enfants de la nuit, c’est ainsi qu’il les nommait. Ces créatures hideuses qui s’ébattaient sous la fenêtre de notre chambre, dans le cimetière désolé. Elles étaient pourtant presque aussi actives durant la journée : piaulant, gloussant et se chamaillant, elles fouissaient les tombes décrépites et les flaques fétides d’eau noire avec une avidité frénétique. »

Mais après tout, deux noirs au bout d’une corde, on s’en balance un peu… Non ? Il y a plus important : la Malédiction ! Une jeune femme, bien sous tous rapports, la fille du pasteur, enlevée lors de son mariage par un « être », plus proche du diable que de l’humain, parait-il, pourtant on a fumé le cigare ensemble le mois dernier, mais je lui ai trouvé un air louche quand même, surtout après le second bourbon pris dans le fauteuil en cuir de la bibliothèque.