Il
fait froid, il fait sale. Des poussières du Nord. Bienvenue chez les ch’tis où
les hommes battent leurs femmes avant ou après d’aller boire une bière entre
potes, où les filles se font prendre dès l’âge de floraison, où il n’y a même
plus assez de patates pour faire des frites, seuls quelques quignons de pains
rassis trônent encore sur la table ou dans la soupe. Une lecture du grand Nord,
celui des Hauts-de-France maintenant, celui des bas-fonds d’antan, le temps de
Zola. Cette poussière noire se retrouve sur tout le paysage, et même là où on
ne l’attend pas, dans les bronches et les poumons. Les gars qui descendent à la
mine, en ressortent le teint noir. Leurs crachats sont mêmes devenus noirs.
Même la misère leurs fait broyer du noir. Ne pense pas à ton petit noir du
matin, même dilué avec un ersatz de chicorée, le goût reste infect et
l’amertume prenante. L’eau noir probablement. L’amertume de la vie les emporte au
tréfonds de la terre, à creuser des galeries souterraines pour un extraire une
substance qui n’a rien à voir avec l’or noir, et pourtant. Back in Black.
« Le puits dévorateur avait avalé sa ration
quotidienne d’hommes, près de sept cents ouvriers, qui besognaient à cette
heure dans cette fourmilière géante, trouant la terre de toutes parts, la
criblant ainsi qu’un vieux bois piqué de vers. Et, au milieu du silence lourd,
de l’écrasement des couches profondes, on aurait pu, l’oreille collée à la
roche, entendre le branle de ces insectes humains en marche, depuis le vol du
câble qui montait et descendait la cage d’extraction, jusqu’à la mesure des
outils entamant la houille, au fond des chantiers d’abattage. »