lundi 13 mars 2017

Quatre-vingt-dix Chapitres d'une Vie

Je te raconte l'histoire d'un petit garçon juif de Hongrie qui a fuit Bucarest avec ses parents – ne pas passer par la case Auschwitz.
Je te parle aussi d'un quinquagénaire sur un lit d’hôpital, lui n'a pas éviter la case Cancer.
Cancer du Tropique, j'ai pris un billet pour Cuba.
Je me vois dans la peau d'un jeune étudiant, premiers amours, souvenir de dépucelage, Paris peut-être.
Le petit garçon arrive à New-York, quartier du Bronx.
Un quadra travaille dans une boite de publicité avant de se faire virer.
Le jeune étudiant rêve d'être écrivain.
Et si je cherchais une maison d'édition, pour son livre. Le Serpent à plumes serait une bonne idée, faire entrer le jeune écrivain dans le panthéon des auteurs publiés. Et quel écrivain ! Foi de lecteur.
Un homme d'âge moyen, fraîchement divorcé ou bientôt marié, suivant comment je prends les épisodes – dans l'ordre ou le désordre, pire qu'un tiercé sur la pelouse d'Auteuil. Parce qu'il n'est pas juste question de trois bourrins sur un hippodrome. Non, là je te parle de quatre-vingt-dix chapitres d'une vie, putain de vie. Deux enfants qu'il voit, puis qu'il ne voit plus, le silence avant la mort...

Des chapitres qui se succèdent comme autant de bières que je prends seul, avant de finir moi même en bière. Cynique, cynisme d'une vie. J'adore. Ce côté, drôle et crue, triste et décalé, décrit dans des mini scénettes, une page ou deux, genre nouvelle à la Richard Brautigan ou à la Raymond Carver. Pas de longs discours, un bout de vie, une tranche de rien, du vide et de l'amour, quelques gouttes de sperme qui perle comme une goutte de sueur sur la tempe de Mick Jagger pendant que Keith Richards se fait un shoot entre deux titres. Magnifique, j'ai envie de dire. Un coup de cœur, pour originalité et le cynisme.


« L'homme d'âge moyen se compare au héros d'un film à la télévision. C'est l'histoire d'un producteur de disques à qui tout sourit.

Affalé sur le canapé, il se sent totalement perdu, culpabilisant d'avoir manqué toutes les nombreuses opportunités qui s'étaient présentées à lui et d'avoir échoué à toutes les épreuves, amour, famille, travail, amis.

Ce soir, il a l'impression que tout le monde est mieux adapté à l'existence que lui.

Il envisage vaguement de soit retourner à l'université, pour, à son âge, étudier Dieu sait quoi, soit de se flinguer, mais alors il ne faut pas que ça fasse mal. »

Original ? Qu'est-ce qu'il me sort... Qu'y-aurait-il d'original dans ces histoires juxtaposées ?
Le jeune étudiant qui rêve de devenir écrivain travaillera dans la publicité tout en écrivant le soir, il était ce petit enfant juif il évitera les nazis mais pas les moqueries de la vie, dans son école, dans son agence de publicité, sur une table d'opération. Toutes ces personnes n'en font qu'une, toutes les scénettes ne représentent qu'une seule et même vie, celle de « l'homme qui se croyait plus beau qu'il n'était ». Je te rassure, ce n'est pas moi, même si ces putains de vie qui n'en feront qu'une au final, lorsque l'on remet dans l'ordre, furent une révélation pour moi. Un bouquin pour moi. Parce qu'il y a du moi dedans.

J'ai fermé la dernière page de ce roman hier. J'ai déjà envie de le relire, de lire de nouveau tous ces quatre-vingt-dix chapitres, de les imprimer et de les remettre dans le bon ordre. Quelle idée a eu l'auteur, Mickael Korvin, de m'écrire et de mélanger ses feuillets avant de les donner à son éditeur. Tiens l'auteur vit entre New-York et Paris, il est né en Hongrie et son livre est édité chez Le serpent à plumes. Un récit par conséquent que je vois sous un autre œil, celui de l'autobiographie romancée et totalement décalée. J'aime son cynisme.

« L'homme dans la fleur de l'âge est depuis peu l'amant d'une jeune femme, accro aux produits bio, qui se trouve également être bisexuelle prédatrice et nymphomane.

Elle fait l'amour n'importe quand, avec n'importe qui, n'importe quoi.

Un soir, lors d'une fête de publicitaires où il l'a emmenée, elle attrape un jeune minet, et se le tape dans les toilettes, à grand bruit.

Une autre fois, c'est une remise de trophée, après laquelle elle participe seule à une orgie, avec les propriétaires de la salle de réception, un couple de lesbiennes imbibées comme des biberons.

Puis, à son tour, l'homme dans la fleur de l'âge accompagne sa petite amie nymphomane et bisexuelle à une partouze.

C'est une grande première pour lui et il ne sait pas trop comment ça va se passer.

Il s'avère que la personne qui les avaient invités à omis de leur indiquer un détail : il s'agit d'une orgie bisexuelle, mais de bisexualité masculine !

Le petit appartement est rempli d'hommes nus, recrutés sur internet pour la taille de leur pénis, et venus faire l'amour trois par trois avec deux malheureux couples consentants, sur des matelas tachés, à même le sol.

Il s'assied par terre en caleçon, au milieu de cette forêt de bites gigantesques. Celles-ci se dressent d'autant plus fort que sa copine vient de retirer son soutien-gorge, libérant une paire de seins refaits hors-norme.

Elle se fait prendre par absolument tout le monde et dans toutes les positions, par tous les trous, oreilles comprises.

Elle se fait mettre par tous, sauf lui, complexé par son gabarit standard.

Il l'écoute hurler comme une truie. Il est à ce point sensibilisé avec cette fille délurée qu'il n'est même plus tellement jaloux.

Mais doit quand même se soûler tous les jours pour vivre avec.

Après un mois à ce régime, il est guéri à vie de la possessivité intransigeante qui avait caractérisé toutes ses relations amoureuses jusqu'ici.

Elle lui inspire un roman traitant autant de bio que d'orgie, d'où le titre Biorgie. »


Un livre qui saura en surprendre plus d'un, parle Noctenbule de 22h05 rue des Dames à qui je dois la découverte de ce livre, de ce roman foisonnant d'originalité. Un livre fait pour moi, effectivement. Une lecture (d)étonnante ! Merci.



« L'homme qui se croyait plus beau qu'il n'était », Mickael Korvin.

8 commentaires:

  1. On est rarement déçu chez ce serpent à plumes. Je vais m intéresser à ce cas avec ou sans mort subite en bout de page.
    la ptite frimousse sur la photo, c'est pour faire faire diversion ?

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    1. Une maison d'édition vers laquelle je me tourne peu, mais rarement déçu, je le suis effectivement.

      Une frimousse en guise de diversion pour ne pas toucher à ma mousse...

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  2. "Une lecture (d)étonnante" donc tentante !

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  3. merci pour toutes ces références qui ne peuvent que nous régaler !

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    1. Tout le plaisir est pour moi, et celui de découvrir ce roman qui se lit si vite qu'on a juste envie de replonger dedans, la guitare de Keith Richards en tête...

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  4. « une jeune femme, accro aux produits bio, qui se trouve également être bisexuelle prédatrice et nymphomane »

    « rempli d'hommes nus, recrutés sur internet pour la taille de leur pénis »

    « par tous les trous, oreilles comprises » (pourquoi pas! ^^)

    Une tabarnak de vie, du cynisme, un livre avec du « toi » dedans, ishhhhhhh!!! ^^

    « un bout de vie, une tranche de rien »... :-*

    (bisous au passage à la princesse Marilou <3)

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    1. Des tranches de rien qui font une vie... de beaux mots à l'intérieur, un peu fous, un peu cyniques, oui c'est ma came...

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