mardi 28 novembre 2017

Les Fleurs de Macadam

Maeve, Loïc et Frédérique forment un trio d’inséparables que la vie sépare de temps en temps au grès des aléas du vent et des envies. Fameux triangle des Bermudes où au bout du compte, Maeve se perd dans ce conte à trois. Si des liens forts les unissaient au temps de l’adolescence, ces accroches semblent empêcher Maeve de vivre pleinement sa vie actuelle et ses rencontres. Accrochée à Loïc, amoureuse de Fred, sa vie erre de l’une à l’autre, entre deux tea-time aux sablés alléchants avec la vieille du dessus… Jusqu’au jour où elle croise la vie de Max – et sa fille – et qu’elle sente qu’il faut redéfinir son emprise avec Loïc, tout en gardant l’odeur des sablés et de cigarette dans le hall de son immeuble. Mais comment demander à Loïc de lui rendre son jeu de clé ?

« Le reflet que le vin laissait sur ses lèvres m'invitait depuis un moment. À la lueur des réverbères, j'ai retiré mon chandail, que j'ai laissé tomber à mes pieds. Ses doigts ont effleuré mes seins de longues minutes avant qu'il ne me prenne. Sur le tapis du salon, une valse maladroite et libératrice. Sur mon ventre, des gouttelettes de vin blanc renversées par mégarde, sa langue. Au milieu de notre guerre silencieuse, nous avons joui. Moi la première. » 

Premier roman de Miléna Babin, d’une jeunesse talentueuse, j’ai pris un plaisir à découvrir l’auteure dans cette histoire si fréquemment étudiée, le passage de l’adolescence à l’âge adulte. Un vent de fraicheur souffle sur les pages, c’est qu’au Québec il peut faire frette, mais un index qui descend lentement dans le creux  des reins jusqu’à la craque des fesses réchauffe l’atmosphère, mon sourire et mon âme à cette image. Entre deux chapitres, je m’imagine déambuler dans la rue, entre les craques des trottoirs, dans mon coton ouaté, jusqu’au prochain dépanneur pour acheter un paquet de cigarettes et quelques bouteilles de Trois Pistoles. Grimper dans une van, une Seagull à l’arrière, faire chauffer l’autoradio d’un hard-blues enivrant et suivre les étoiles qui filent jusqu’au point de rendez-vous : BBQ & Binouzes chez Max. La simplicité même. Cela s’appelle, je crois, sourire à la vie.


« Il a remonté mon chandail jusqu'à mon cou, détaché mon soutien-gorge et relevé du bout de la langue le minuscule anneau argenté qui encerclait mon mamelon. Je regardais son visage enfoui entre mes seins. Sa bouche descendait jusqu'à mon sexe et remontait de temps à autre jusqu'à la mienne, pour, entre deux coups de langue, me demander pardon. Perdus dans ses boucles blondes, mes ongles traçaient les lettres du mot merci, qu'il aurait été déplacé de prononcer à voix haute. »

Cela me passionne toujours ces voyages littéraires, découvrir la chaleur d’un pays par la vie des autres, vivre d’autres vies plus foudroyantes et gelées, se réchauffer le cœur et la vie de bons sentiments, de majeurs dressés et de bières arrosées. De cartes postales en escales littéraires, des mots posés à même le sable un parasol planté dans un verre de rhum, atterrir sur un tarmac et s’envoler vers d’autres horizons en direction du soleil ou de la lune, ces road-trip me font survivre ; quand le chapitre s’achève, de nouvelles pages défilent sans oublier les histoires précédentes qui restent ancrées dans la mémoire de l’âme. Miléna m’a fait voyager entre les craques des trottoirs.       

Des instants d’émotions, des moments de sensualité, un vent de fraîcheur et d’adolescence, l’amour en filigrane, du chagrin et de l’âme. Loïc, Fred et Maeve, Les Fleurs de Macadam, une amitié forte mise à l’épreuve du temps et de l’amour. Un cœur enrobé au sirop d’érable, mon pusher de littérature québécoise, toujours amarée aux mots, une lecture qui coule de source, comme la Chambly dans son verre ou le sirop d’érable entre la craque des… BLACK-OUT.  

« L’orage a éclaté, encore.
J’ai senti un souffle sur mon cou, puis un doigt s’infiltrer derrière l’élastique de ma culotte. En expirant la fumée, je me suis concentrée sur son index qui se frayait un chemin à travers mon sexe encore humide.A peine avais-je fini de jouir quand l’électricité est revenue. Reflétés par la porte-fenêtre, mon visage, mes cheveux humides collés le long de mes joues. »


« Les Fantômes Fument en cachette », Miléna Babin.

 


6 commentaires:

  1. Ah c'est bien vrai qu'on peut en faire des trucs avec du sirop d'érable...
    Parole de grenouille !! ;)

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    1. Moi, je mets le sirop d'érable sur mes pancakes, mais je dois manquer cruellement d'imagination...

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  2. J’avais tellement aimé le vent de fraîcheur et la sensualité dans ces pages et toutes les réminiscences qu’elles ont fait remonter en moi de souvenirs et d’amour. Malgré le frette il reste les majeurs, les craques ou mieux encore le majeur dans craque, sans oublier l’ami Max, fidèle à ses caisses de bdc et sa guitare. Ça m’a rendu presque nostalgique, Québec sans doute, de bons vieux endroits cités dans le roman, l’adolescence et son insouciance.
    « De cartes postales en escales littéraires », je laisserai mon coton ouaté sur la banquise, j’repars voyager en gougounes pour faire escale vers le Sud (le nord du sud ou le sud du sud), reste à voir, je n’ai toujours pas pris mon billet d’avion. À moins que je parte en Westfalia, comme je reste sur le continent... :D

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  3. Un vent de fraîcheur et de sensualité apporté par la broue, bien entendu.

    Toujours - ou encore - en escale, les gougounes y'a rien de mieux pour vadrouiller un pays chaud et humide de sensualité et de musc sauvage. Envie de croquer dans une mangue mûre ?

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