J’ai laissé la moto au garage, comme mon âme de biker. Plus une question de prudence qu’un hommage à Johnny. Mais écouter les Allman Brothers Band dont le nom a perdu en 1973 une partie de sa raison d’être en Harley peut s’avérer dangereux. « Brothers and Sisters », cinquième album du groupe. Un album qui me fait du bien, presque joyeux. Certes, de l’excellent blues, une pointe de boogie-woogie, un soupçon de country, mais j’ai tendance à préférer les oraisons funèbres et intimes à l’hymne à la joie et la joie de vivre. Le blues se doit d’être triste, sombre mais lumineux, l’univers d’une âme en peine, d’un pauvre type devant son verre, à demi vide. Alors, dans un nuage de poussière, âme du désert, je démarre le pick-up, couleur poussière, siège en cuir, radio branchée canal « Radio Poussière ». J’ai les santiags qui frétillent dans le South, direction le dinner, mélange de bruit et de poussière, celui avec une serveuse au sourire plantureux. Bière et slide guitare au programme pour une nuit torride, celle avec Jessica.
Forcément, tu la connais cette Jessica. Elle est belle et elle boit sa bière au goulot. Ou alors c’est parce qu’elle boit sa bière directement à la bouteille qu’elle est si magnifique à mes yeux. Ses lèvres dansent au son du blues et de la descente, ses seins tournent avec la country, le stetson s’envole laissant voir le regard de braise qui anime cette nana. Un gros gars barbu et tatoué émet un rôt fier et enivrant de son odeur, ça tapote affectueusement sur la croupe des serveuses, objets sexuels de tous les désirs, ça cogne des santiags contre le plancher poussiéreux et mégotté, on dirait un troupeau de bisons sur une piste de danse, tout dans la légèreté.
In the name of rock, c’est le nom de mes muses qui jouissent dans mes rêves de rock and girls. Aujourd’hui, elle se prénomme Jessica. J’ai croisé son regard de flamand rose, sous le soleil de Floride, Gainesville. Un soir d’été de 1982. Demain, ça sera peut-être Paloma. Dickey Betts est à la guitare, encore pour quelques années au sein de la formation malgré son statut de fondateur. Guitare slide, les accords majeurs glissent, mon majeur se glisse aussi dans ce parfum légèrement iodé et chaud que m’apporte le Gulf Stream.
In the name of rock, c’est le nom d’une chronique annoncée et bien aimée d’un gars à la chevelure de rockeur sudiste, surtout par grand vent, et aux tatouages façon Sons of Anarchy. Des prénoms, du blues, du rock et du folk, dans le désordre. Lui aussi a dû croiser son regard, un regard à la Jessica ou à la Paloma, fin connaisseur de cette période, et de ces trous perdus de l’Amérique qu’il a souvent chevauché avec ou sans stetson, avec ou sans santiags, avec ou sans pouliche. Pas si perdu que ça d’ailleurs, aujourd’hui, parce que je l’emmène dans mon pickup à Nashville, Tennessee pour découvrir la même Jessica, encore plus fraîche, toujours aussi désirable. Le temps n’a pas de prise sur les beautés des muses infiltrées dans nos têtes. Un soir d’été toujours, j’associe la guitare slide à l’été, mais en 1986.
In the name of rock, finalement j’aime bien cette histoire de raconter l’histoire d’une fille, celle qui en trois accords à peine mineurs arrivent à transformer une partition de notes en un accord majeur du rock. Mais l’idée n’est pas de moi, je ne suis qu’une poussière dans ce désert de rock et de verres à demi vide, j’espère juste qu’il ne m’intentera pas un procès, pour vol d’idée, pas de muse, les muses n’appartiennent qu’à soi, au fond de son cœur, au tréfonds de son âme, au bout d’un majeur.
Si la part belle est faite à Jessica, pour son air entêtant, comme un parfum enivrant de jasmin ou de patchouli, ce vieil album des Allman Brothers Band, presque aussi vieux que moi c’est dire l’âge canonique de Jessica ou le mien, comporte quelques autres petits airs, en direction du Sud, un peu plus bluesy « Southbound », à la rencontre d’autres vagabonds du rock – que je rêve d’être - comme ce « Ramblin’ Man ». A découvrir donc, même si ce « Brothers and Sisters » n’est pas mon préféré… Parce qu’avant tout, les Allman Brothers Band font des concerts, un groupe de live qui donne nettement plus de vie, d’entrain et d’envie, que les albums studio. Des lives d’une nuit ou d’une vie qui font de Jessica une muse bandante jusqu’à ma (petite) mort.
« Brothers and Sisters » [1973], Allman Brothers Band.
Hey l'ami! Putain d'article (ça veut dire que j'adore), putain de Southern, putains de prénoms qui nous ont fait mal et bien. Et putain de hasard, c'est aps d es conneries j'te jure, j'essaie de jouer et chantonner une autre fille, Melissa, elle aussi des ABB, que je mettrai en ligne au moins dans la version des frères du Sud. Ta chronique de ce jour c'est une bonne part du sel de ma vie. Bien sûr la chevelure est discrète et les tatouages sont restés virtuels mais le feeling blue, on he road gain, et crossroads est toujours bien là. Alors Beerly yours, dear Buffalo, see you next whiskey bar. Pour le procès on verra plus tard. Par contre pour l'âge canonique, je voudrais pas te blesser, mais c'est encore bien jeunot tout ça.
RépondreSupprimerMerci pour tout ça et le reste Old Chap. We were born to be wild (au moins dans l'esprit).
in the name of rock, putain de titre ! J'aurai rêvé d'avoir une telle idée... Sweet Melissa...
Supprimerj'ai longtemps eu cette galette entre les mains. Et un prénom hummm ! qui fait de l'effet aussi.
RépondreSupprimerCôté musique, reste cet album incomparable de la bande Allman au Fillmore
On revient toujours au Fillmore...
SupprimerJe ne connaissais pas... quoi que la rengaine entêtante ne me semble pas étrangère.
RépondreSupprimerLe piano a des accents de Keith Jarett je trouve... ce qui n'est pas rien.
Les filles qui sirotent la binouze au goulot ne m'impressionnent guère par contre :-)
Mais jai bien ri en voyant l'âge de l'album. Et ça se dit vieux comme l'hiver;-)))
Auras tu l'audace de diriger ton âme égarée vers ma Ghost story? Tu risquerais peut-être de m'en vouloir...il y a une sublime chanson. Mais ni sexe ni alcool ni agneaux qui se roulent dans la gadoue...
Je vais d’abord aller voir le film, l'esprit vierge de toute sensation, et je viendrais te revoir...
SupprimerJe suis d'humeur à prendre le bison par les cornes :
RépondreSupprimerTrop de notes, trop de staches, trop de red et de necks. Et de ABB à ABBa, y a pas loin.
C'est vrai que je n'avais pas fait jusqu'à présent sur ces longues chevelures blondes...
SupprimerParlant de Gulf Stream, j'y amarre justement bientôt mes santiags ou ma combinaison de plongée...
RépondreSupprimerPendant que tu glisses ton majeur dans les embruns iodés, je glisse le mien sur la platine pour écouter ta musique matinale... câlisse...
Tu peux rester en gougounes à cte heure ci. Sauf si tu dors avec tes santiags :-)
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