Les étoiles scintillaient encore dans le ciel d’un bleu noir, sombre illuminé par une lune maritime si près du pôle qu’on pourrait la caresser. Des glaçons dans mon verre, on the rocks, sonnent comme une corne de brume par temps de brume. Un énorme glaçon – dans le genre gros iceberg qui se promène la nuit sans faire de bruit, s’épanche sur le pont d’un bateau de croisière. Le fracas est prévisible, en cette douce et froide nuit du 14 au 15 avril 1912. Le Titanic sombre, un homme sur le pont fume le cigare, quand les corps se jettent à l’eau…
Au sommet des Dolomites - je t'aurais bien fait une rime avec sodomites, mais l'histoire ne s'y prête pas même avec une femme la fleur de l'âge, même avec une histoire d'amour et d'origami -, des fumées sur le mont Fumo sous le regard de la lune alpine et des étoiles italiennes, un homme sorti des tranchées fut fait prisonnier. Nous sommes le 14 avril 1916, Jacob Roumann, docteur dans une guerre d’horreur et de mutilés, se voit charger d’interroger le prisonnier.
Qui est-il ?
est la question de son supérieur.
En réponse, il obtiendra deux autres questions :
Qui est Guzman ?
Et qui était l’homme qui fumait dans le Titanic ?
Qui est-il ?
est la question de son supérieur.
En réponse, il obtiendra deux autres questions :
Qui est Guzman ?
Et qui était l’homme qui fumait dans le Titanic ?
Et pour avoir les réponses à ces trois questions, il faudra être patient, écouter toute l’histoire d’un homme qui avec quelques cigarettes de bon tabac épanchera une histoire fabuleuse, dans le genre histoire d’amour inachevé… C’est qu’il est un grand conteur, ce mystérieux homme, dans le genre à hypnotiser son auditorat par la magie des mots.
« Nous étions à Paris, le 26 mai 1900, il était 23 heures, 21 minutes et 40 secondes. A dix mille kilomètres de cet instant, un homme prénommé Martin mourait écrasé par le poids d’une barre d’acier dans les fonderies de Cleveland. Ce même instant, un an plus tôt, une inconnue avait accouché d’un enfant sur l’autel principal de Notre-Dame. A exactement huit heures de cet instant allait se produire un événement que les hommes n’oublieraient jamais – la dernière éclipse de Jérusalem.
A cet instant, l’orchestre entonna une musique sans nom. Une musique que personne ne pouvait connaître, parce qu’elle n’arriverait en Europe que des années plus tard. Une musique dont la plupart des invités avaient entendu parler – de rio de la Plata, elle était arrivée aux bas-fonds de Buenos Aires, où les blancs se mêlaient aux Noirs pour donner vie à une danse aussi sensuelle qu’une prière interdite et aussi maudite qu’une fièvre.
L’orchestre entonna un tango. »
Donato Carrisi, bien connu des lecteurs écorchés par le chuchoteur, signe un roman presque empreint de poésie et de mélancolie. A être pris sous le charme de la plume de l’auteur… ou pas. Je reconnais par contre que plus les pages se tournaient, mon regard détourné par les volutes d’un parfum d’amour à l’italienne, moins je savais à quoi m’attendre. Ce n’est pas du suspense, nous ne sommes pas dans un roman noir, mais l’auteur cache parfaitement son jeu, ne sachant jusqu’où il allait m’embarquer – pas à bord du Titanic, puisqu’il avait déjà sombré depuis bien longtemps, comme mon âme à l’évocation d’une femme qui glisse des fleurs de papier dans des livres...
« La femme aux fleurs de papier », Donato Carrisi.
Très mystérieux dis donc.
RépondreSupprimer"poids d’une barre d’acier fans les fonderies". J'ai lu plusieurs fois pour comprendre, me demandant ce que des fans faisaient ici... :-)
Rrrr... je l'avais vu... mais je m'étais dit qu'il faisait trop chaud pour corriger... voir même trop chaud pour être lu, je n'imaginais pas que quelqu'un(e) puisse être attiré(e) par la fraîcheur du Bardouin...
SupprimerQuel poésie et sensualité dans tes mots, cela me donne envie de survoler ce Titanic, juste survoler pour ne pas y rajouter du poids et qu’il ne sombre davantage !
RépondreSupprimerJe n’aurai pas bu un Henri dans un verre de Ricard pour lire ce livre et écouter ce Besame Mucho, quel faute de goût ;-)
Je ne sais pas ce que j’aurai bu, mais certainement un alcool fort qui te permet de danser un tango sans honte même si tu ne sais pas le danser
Merci Bibi pour ce tango argentin, j’adore la partie piano ! Mon père le jouait au saxo, cet musique fait parti de mon patrimoine musical :)
Besame Besame mucho como si fuera là ultimatum vez ...
C'est que je n'ai aucun savoir-vivre, et surtout qu'un seul verre Ricard, même pour un Henri Bardouin. Après tout, je ne suis qu'un homme, à défaut d'être un vrai bison.
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