Quelques gouttes dans un verre, ou un côté "si-je-prenais-soin-de-mon-corps" conjugué à un "si-je-me-faisais-une-couleur" me poussent à pénétrer l’antre de ce Salon de beauté. Un accueil chaleureux, couleur chatoyante, calmitude et zénitude pour profiter des rayons de soleil qui se couchent avant la nuit chaude qui m’attend dans les ruelles mexicaines. Tenu par un travesti extravagant mais avec l’âge introverti, il a le sens de la déco et l’amour de son prochain.
Pour l’ambiance, des dizaines d’aquarium, les poissons ça calme, ça rend serein, ça rend zen ? Ça aide à oublier le monde et sa relative cruauté. Il m’explique qu’il a commencé avec des guppies, parce que c’était plus ou moins faciles à élever, avant de relever le défi sur des poissons plus colorés ou plus carnivores.
Un mal incurable, poisseux, quelques pestiférés tabassés dans les rues. Pour l’amour de son prochain, ses activités de « salon de beauté » ont dérivées pour prendre en charge des personnes dont personne ne voulait, des malades, des vieux, des fins de vie que l’on souhaite se décharger. C’est mieux qu’une décharge, mais cela reste quand même un mouroir. Mais un mouroir humain.
« Il est curieux de constater que les poissons peuvent influer sur l’humeur des personnes. Par exemple, quand je me suis pris de passion pour les carpes dorées, en plus du calme que m’apportait leur contemplation, j’étais en perpétuelle quête de quelque chose de doré pour orner les robes que je portais pour sortir la nuit. Ça pouvait être un ruban, des gants ou des hauts en maille. Je pensais que quelque chose de cette couleur pouvait me porter chance. Peut-être m’éviter de tomber sur la bande de petites frappes qui rôdaient dans le centre-ville. Beaucoup ne sortaient pas vivants des attaques de ces malfrats, et je crois que si quelqu’un s’en tirait, c’était encore pire. Dans les hôpitaux où on les acceptait, ils étaient toujours traités avec mépris. Bien souvent, on ne voulait pas les recevoir, de peur qu’ils ne fussent contaminés. À compter de ce moment-là, la compassion qui me poussait à recueillir ces compagnons blessés qui n’avaient aucun lieu où aller vit le jour. C’est peut-être ainsi qu’est né ce triste mouroir que j’ai le malheur de tenir. »
C’est un beau texte, auteur mexicain, qui pousse à la réflexion sur notre corps et notre déchéance, et par conséquent sur notre société. Le pathos qui pourrait facilement s’écouler dans ce genre de sujet n’est jamais présent. A la place, je trouve de la compassion et de l’humanité. Quelques scènes autour de la tenue des aquariums et des différents poissons que l’on peut y trouver, comme un parallèle à la vie humaine. Le dernier aquarium s’éternisera-t-il dans une décharge à ciel ouvert ? Je me dis d’ailleurs que ça pourrait faire un beau film chiant, et moi j’adore les films chiants, ça me repose et surtout il y a tant d’âme dans les films chiants, bref, je ne vais pas étaler ma vie cinématographique sur la place publique, j’ai mieux à faire comme de finir ce Diplomatico, place centrale, trompettes mariachis, vue sur les chiottes, au coin du mouroir, ce « salon de beauté » de dernière génération.
« Salon de Beauté », Mario Bellatin.
Pour le mouroir si on peut attendre un peu. Par contre l'Englanol ou le Spanglish de Burns, Convertino (c'est bien ça, dis-moi?) et Calexico me plait toujours. Hasta luego!
RépondreSupprimerle mélange du terroir de Tucson, Jo Burns & Jo Convertino...
SupprimerMoi aussi j’adore les films chiants, ceux avec des poissons principalement, je les regarde avec cet air de lapin que donne la crainte des arêtes dirait l'autre. ;-)
RépondreSupprimerCela dit Calexico, comme eeguab, ça me plait toujours autant.
Je vois qu'il y a de grands amateurs (de Calexico)
SupprimerMouais, mouais, mouais...
RépondreSupprimerPour moi, ce sera poisson pané et sauce tartare ! ^^
un menu de circonstance... dans un mouroir...
SupprimerM'a l'air bien sympathique ton héros.
RépondreSupprimerEt les films (beaux et) chiants, c'est vrai, parfois ça le fait.
surtout humain, à l'image des films chiants (et beaux).
SupprimerEn déambulant dans les rues chaudes mexicaines, j'me dis que croiser quelques poissons ça doit bien être aussi plein de calmitude et de zénitude que de croiser Le Bison de la nuit en pleine transe méditative ...
RépondreSupprimerJ'te prendrais un p'tit fond de Téquila svp, la dernière goutte, de préférence.
D'autant plus que les bisons doivent être aussi bavards que les poissons, donc ça passerait plutôt inaperçu dans les nuits chaudes et endiablées de Mexico...
SupprimerOn ne parlera jamais assez les vertus... curatives... d'un Diplomatico !! :-)
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