« Dehors un vent d’ouest léger porte des bruits de canon. La guerre est ce soir dans le crépuscule comme la mer dans les coquillages. »
La Grande Guerre a quelque chose de poétique, comme l’âme de Séraphin. Ce garçon qui vit dans son monde, un monde de silence et de regard. La neige tombe, au même rythme que les bombes, mais avant cela, il y avait cet enfant, si particulier que les gens lui attribuèrent facilement le rôle de l’idiot du village. Et pourtant… Séraphin se découvre, se révèle… aux yeux du vieil Ernest.
« Le silence qui couvrait les jardins potagers était magnifique. Il était à la fois si calme et si radieux que le chant éraillé d’un merle y donnait presque envie de sourire. Le moindre craquement étendait une paix merveilleuse. C’était en général une branche qui venait de se délester d’une petite cargaison de neige dans un poudroiement d’or. »
Au milieu de ses grandes horreurs, la guerre bat son plein, en plus de la campagne. Séraphin, lui, regarde Ernest en train de souffler le verre. Toujours en silence, il observe. Et si souffler le verre allait devenir sa vie, parce chacun doit avoir sa place dans ce monde-là, même au milieu de la guerre, et ce n’est pas le commandant allemand qui en dira le contraire. Même au milieu de silences incompris.
« L'automne a beau toucher désormais à sa fin, il refuse exceptionnellement de refroidir, se bornant à faire défiler là-haut à longueur de journée de gros ciels tumultueux, où d'énormes nuages blancs et noirs se précipitent, se bousculent, apparemment trop occupés de leurs fantasias pour pleuvoir. Tandis que, sous ces marées vertigineuses, l'air demeure incroyablement calme et tiède, presque sans un souffle. L'automne finissant est un formidable exode du ciel au-dessus d'une légère odeur de terre morte. »
Séraphin Verre, c’est la découverte d’une poésie du silence, de la neige et de la guerre. Un cocktail détonnant au milieu des bombes. L’écriture de Christian Pernath que je découvre me plonge dans le terroir des campagnes, au milieu du froid, de la neige et des tranchées. Et dans ce panorama où les saisons s’enchaînent et les flocons se déchainent, vers cette lande embrumée, il y a ce Séraphin, mutique et pourtant lumineux. Le roman devient lumière lorsque souffle le verre, je souffle un verre de bière.
« Séraphin Verre », Christian Pernath.
Un souffle de vie et d'espoir pour Séraphin, ce seul regard posé sur lui (!)
RépondreSupprimerSi la bière était bonne, c'est l'essentiel.
la bière était très bonne, merci.
SupprimerSe terrer dans un monde de silence rien de plus beau, surtout quand là, dehors, c'est l'horreur.
RépondreSupprimerIl a tout compris ce petit...
Un roman qui te plairait...
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