vendredi 13 décembre 2019

La Vie en Bleu


Ma première approche, très caricaturale, remonte aux années 89-90, la rencontre avec Raymond Babbit. Ray compte les cartes, « pouvoir » très intéressant sur une table de blackjack, et ça, Tom Cruise a bien perçu le potentiel de son nouveau frangin. Rain Man, le syndrome du savant, à l’époque associé à cette époque-là au syndrome d’Asperger. Une minuscule facette de cette « vie » qui a eu au moins le mérite d’évoquer au grand public la notion d’autisme.

Daniel Tammet a ce même profil, capable de te citer les plusieurs milliers de décimales qui composent le nombre pi. Moi, je n’en connais que 5, je sais c’est minable. Mais avant tout, dans ce bouquin, il montre sa vie, ses difficultés, surtout pour son entourage, et ses joies, ses amours. En fait, il vit avec ce syndrome comme une personne lambda, comme toi comme moi, il voit simplement les choses de façon différente, une association de couleur, des mots bleus, de la chaleur ou des idées qui s’associent. Très intéressante, cette perception du monde, pour comprendre comment son cerveau fonctionne.


« Aujourd’hui, au moment même d’écrire sur mon enfance, je suis frappé par tout ce que mes parents ont fait alors que je ne leur donnais pas grand-chose en retour. Les écouter me raconter mon enfance a été une expérience magique pour moi, qui m’a fait comprendre, rétrospectivement, l’importance du rôle qu’ils ont joué dans la constitution de la personne que je suis devenue. En proie à tous les problèmes que je leur posais, mes pleurs, mes colères, ils m’ont aimé sans conditions, se sacrifiant pour m’aider – petit à petit, jour après jour. Ils sont mes héros. »

Daniel revient sur son enfance, cette période scolaire incomprise où il parle aux arbres comme d’autres froisseraient les feuilles des arbres pour sentir ce crissement entre les doigts. Il est différent, il s’en est rendu compte rapidement, mais il a pu vivre, devenir quelqu’un de bien, de grand, capable de voyager seul, de vivre des aventures, malgré les craintes de ses proches, et surtout d’aimer. Ce fut donc une belle rencontre à la découverte des autres.

Il y a quelques mois, j’ai croisé un autre gars, un jeune ado avec ce syndrome d’Asperger. En quelques minutes, il m’a déjà fortement impressionné. Quelle vie, quelle pétillance, quelle éducation, quel regard… En quelques minutes, il m’a appris des trucs sur la vie, sans même probablement qu’il ne s’en rende compte, parce qu’il était simplement lui. Bien sûr, qu’est-ce qu’un aperçu de quelques minutes dans une vie, et j’imagine que les dispositions ne sont pas toujours faciles, mais quel amour ce gars-là, j’avais envie de lui serrer la pince, mec, si tu l’acceptes de la part d’un pauvre bison, tu m’as grandi, petit (d’ailleurs, il est aussi grand que moi), dans ma triste réalité.   

« Je préférais marcher dans le silence, dans les longues rues vides éclairées par la lune. »

Je me permets même un train d’humour, l’auteur n’en manquant pas non plus, en me disant qu’au fond de moi, je dois avoir aussi un côté autiste, seul dans mon monde, à écouter les silences, à regarder les cailloux au bord du chemin ou le bleu de la lune sans en comprendre ses mystères cachés.

« Étais-je seulement quelqu’un qu’on pouvait aimer ? Je n’en savais rien. »

« Je suis né un jour bleu », Daniel Tammet.
Traduction : Nils C. Ahl.


« il y a vingt-sept personnes dans une pièce et chacune serre la main aux autres. 
Combien y a-t-il de poignées de main ? »

Vous avez 12 minutes 20, je relève les copies. 
Le gars, il te donne la réponse en quelques poussières de secondes

15 commentaires:

  1. Réponses
    1. Quand je lisais cet exercice, j fermais les yeux et imaginais deux hommes dans une grande bulle, puis une moitié de bulle coincée dans le flanc de cette première bulle, avec une troisième personne dedans. Le couple de la grande bulle se serrait la main puis serrait celle du troisième homme de la moitié de la bulle. Cela signifiait trois poignées de main pour trois personnes. Puis j'imaginais une deuxième moitié de bulle avec une quatrième personne... et trois pages après = 351 poignées de main.

      Réponse Correcte ! :-) avec toutes mes félicitations...

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  2. Je préfère le bleu au rose, et largement ;)
    Et puis, il n'y a que Tammet qui me ferait aimer les maths !! Pourtant, son autobio est franchement littéraire.


    S'il suffisait de quelques minutes pour savoir "comprendre" l'autre et l'accepter dans sa différence, ça se saurait depuis longtemps, et le monde tournerait bien (!)

    Mon ado à moi (encore que d'1m75) aimait, en effet, le bruit du froissement des feuilles mortes dans ses mains, regarder pendant des heures le reflet de son ombre sur le sable mouillé... (c'est pourquoi j'aime tant les paroles des premiers couplets de "Ton héritage" de Benjamin Biolay)

    PS : sinon, je pense que tu es mûr pour "Thinking in numbers" de D. Tammet(titre très mal traduit en français : La poésie des nombres).
    Excuse-moi d'avoir été encore trop bavarde. L'émotion que m'a procurée ton billete et les souvenirs prégnants de cette lecture !!

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    1. bavarde... ça comble juste la longueur de mes silences...

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  3. ** et merci pour Jean-Sébastien :))

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    1. Glenn Gould me semblait une illustration si évidente de ce bouquin... Et qui dit Gould dit Bach, l'un ne va pas sans l'autre...

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    1. pourquoi pas effectivement. C'est une autobiographie intéressante pour comprendre un peu le mécanisme de l'auteur...

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  5. Moi aussi je connais 5 décimales de Pi. Je ne suis donc pas autiste, CQFD.
    Glenn Gould❤

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    1. :-)
      Cependant... tu sembles bien comprendre le raisonnement mathématique. Donc...

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  6. Il me reste aussi le carré de l'hypoténuse grâce... au sketche de Guy bedos :
    Le carré de l'hypoténuse
    Est égal
    Si je ne m'abuse
    A la somme des carrés
    Des deux autres côtés...
    Si je ne mabuse.

    J'adore.

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  7. Quel livre ! Je l'ai adoré, tout simplement.
    Je l'ai lu à sa sortie et relu avec mes garçons il y a quelques temps. Un regard bleu et juste sur l'autisme, la différence, et quelle pétillance comme tu le dis si bien...
    Je pourrais même le relire une troisième fois un jour. Pour la beauté de ce jeune garçon...
    Et revoir Rain Man encore et encore. Un sujet qui me touche, forcément.
    Excellent choix de bière pour accompagner ta lecture :D
    Et Bach, mon chouchou...

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    1. Je ne connaissais pas... Je n'en avais même jamais entendu parler. C'est dire que je reste coincé dans ma bulle, à l'écart des autres, du monde, de la vie...

      Rain Man, je ne l'ai pas revu depuis les années 90... Je me dis qu'il n'a pas du bien vieillir... Je sais pas si j'ai même envie de le revoir. Pourtant, fan je suis de Dustin et de Tom...

      La bière... bof... c'est pas mon meilleur morceau. Je trouvais qu'elle allait bien avec le bouquin. Mais gustativement, ce fut pas le délire... bien au contraire... sans intérêt...

      Et Bach...

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